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grands roseaux du rivage courbaient leurs aigrettes de velours noir sous le léger souffle de la brise qui s’élève souvent à la fin du jour ; car le soleil disparaissait lentement derrière une large bande de nuages pourpres, frangés de feu… L’air vif et sonore apportait le tintement lointain des clochettes d’un troupeau.

À travers un sentier frayé dans l’herbe de la prairie, deux jeunes filles, presque deux enfants, car elles venaient d’avoir quinze ans, chevauchaient sur un cheval blanc de taille moyenne, assises dans une large selle à dossier où elles tenaient aisément toutes deux, car elles étaient de taille mignonne et délicate.

Un homme de grande taille, à figure basanée, à longues moustaches grises, conduisait le cheval par la bride, et se retournait de temps à autre vers les jeunes filles, avec un air de sollicitude à la fois respectueuse et paternelle ; il s’appuyait sur un long bâton ; ses épaules encore robustes portaient un sac de soldat ; sa chaussure poudreuse, ses pas un peu traînants, annonçaient qu’il marchait depuis longtemps.

Un de ces chiens que les peuplades du nord de la Sibérie attellent aux traîneaux, vigoureux animal, à peu près de la taille, de la forme et du pelage d’un loup, suivait scrupuleusement le pas du conducteur de la petite caravane, ne