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bonne œuvre ; qu’importe ? nous y laissons nos frères, aussi cachés, aussi nombreux, aussi terribles que les scorpions noirs qui ne révèlent leur présence que par une piqûre mortelle ; l’exil agrandit nos domaines… Frère, à toi l’Amérique, dit-il à l’Indien d’un air inspiré. Frère, à toi l’Afrique, dit-il au nègre. Frères, à moi l’Europe !… Partout où il y a des hommes, il y a des bourreaux et des victimes… Partout où il y a des victimes, il y a des cœurs gonflés de haine ; c’est à nous d’enflammer cette haine de toutes les ardeurs de la vengeance !! C’est à nous, à force de ruses, à force de séductions, d’attirer parmi nous, serviteurs de Bhowanie, tous ceux dont le zèle, le courage et l’audace peuvent nous être utiles. Entre nous et pour nous, rivalisons de dévouement, d’abnégation ; prêtons-nous force, aide et appui ! Que tous ceux qui ne sont pas avec nous soient notre proie ; isolons-nous au milieu de tous, contre tous, malgré tous. Pour nous, qu’il n’y ait ni patrie ni famille. Notre famille, ce sont nos frères ; notre pays… c’est le monde.

Cette sorte d’éloquence sauvage impressionna vivement le nègre et l’Indien, qui subissaient ordinairement l’influence de Faringhea dont l’intelligence était très-supérieure à