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— Arrêtés !… mis en prison ! s’écria Rose.

— Séparées de toi ! s’écria Blanche.

— Oui, mes pauvres petites ! On a tué Jovial… Il faut nous sauver à pied, et tâcher de gagner Leipzig… Lorsque vous serez fatiguées, je vous porterai tour à tour, et quand je devrais mendier sur la route, nous arriverons… Mais un quart d’heure plus tard, et tout est perdu… Allons, enfants, ayez confiance en moi… Montrez que les filles du général Simon ne sont pas poltronnes… et il nous reste encore de l’espoir…

Par un mouvement sympathique, les deux sœurs se prirent par la main comme si elles eussent voulu s’unir contre le danger ; leurs charmantes figures, pâlies par tant d’émotions pénibles, exprimèrent alors une résolution naïve qui prenait sa source dans leur foi aveugle au dévouement du soldat.

— Sois tranquille, Dagobert… nous n’aurons pas peur, dit Rose d’une voix ferme.

— Ce qu’il faut faire… nous le ferons, ajouta Blanche d’une voix non moins assurée.

— J’en étais sûr…, s’écria Dagobert, bon sang ne peut mentir… En route ! vous ne pesez pas plus que des plumes, le drap est solide, il y a huit pieds à peine de la fenêtre en bas… et Rabat-Joie vous y attend…