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San-Pablo contre les vingt caronades de L’Épervier, qui ouvraient leurs gueules menaçantes ?

Le prudent capitaine mit donc en panne, attendit l’événement, ordonna à son équipage de se prosterner à genoux, et d’invoquer san Pablo, le patron du navire, qui ne pouvait manquer de manifester sa puissance dans une telle occasion.

Et, suivant l’exemple du capitaine, l’équipage dit un Pater.

Mais L’Épervier avançait toujours.

Deux Ave.

On entendait déjà le bruit de ses avirons, qui battaient les flots en cadence.

Cinq Credo.

« île me Dios ! » C’était la voix, la grosse et terrible voix de Kernok qui résonnait aux oreilles des Espagnols.

« Oh ! oh ! disait le pirate il met en panne, il amène son pavillon, le gredin est souventé ; il est à nous. Zéli, fais mettre en travers, armer la chaloupe et le grand canot ; je vais aller flâner à bord. » Et Kernok, passant des pistolets dans sa ceinture, s’armant d’un large coutelas, fut d’un bond dans l’embarcation.

« Et si c’est une ruse, si le trois-mâts fait un seul mouvement, cria-t-il au lieutenant, faites force d’avirons et venez vous embosser à longueur de gaffe. »

… Dix minutes après, Kernok sautait sur le pont du San-Pablo, ses pistolets à la main, son sabre entre ses dents.

Mais il poussa un tel éclat de rire que sa bonne lame tomba de sa bouche. S’il riait tant, c’était de voir le capitaine espagnol et son équipage agenouillés devant une statue grossière de saint Paul, et se frappant la poitrine à coups réitérés. Le capitaine surtout baisait une relique avec une ferveur toujours croissante, en murmurant : « San Pablo, ora pro nobis… » San Pablo ne pria point, hélas !

« Finis tes singeries, vieux corbeau, dit Kernok, quand il eut assez ri, et mène-moi à ton nid.

— Senor, no entiendo, répondit