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CHAPITRE I.

le cacou et la sorbière


Par une nuit de novembre, sombre et froide, le vent de nord-ouest soufflait avec violence, et les longues lames de l’Océan venant se briser sur les bancs de granit qui couvrent la côte de Pempoul, les pointes déchirées de ces rocs tantôt disparaissaient sous les vagues, tantôt se découpaient en noir sur une écume éblouissante.

Placée entre deux rochers qui la protégeaient contre les efforts de l’ouragan, s’élevait une cabane de misérable apparence ; mais ce qui rendait vraiment son abord horrible et infect, c’était une multitude d’os, de cadavres, de chevaux et de chiens, de peaux ensanglantées, et d’autres débris qui annonçaient assez que le propriétaire de cette masure était cacou, ou écorcheur.

La porte s’ouvrit, puis parut une femme couverte d’une mante noire qui l’entourait entièrement, et ne laissait voir que sa figure jaune et ridée, presque cachée par des mèches de cheveux gris. Tenant une lampe de fer d’une main, de l’autre elle tâchait d’en abriter la flamme, qui tournoyait, agitée par le vent. — Pen-Ouët ! Pen-Ouët ! cria-t-elle avec un accent de colère et de reproche ; où es-tu, maudit