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Vrai ! c’est un beau brick que le brick L’Épervier !

Peut-on se lasser de le voir droit et ras sur l’eau avec ses formes étroites et élancées, sa haute mâture un peu penchée sur l’amère, qui lui donne un ah si coquet et si marin ; comment ne pas admirer ce gréement fin et léger, ces larges basses-voiles, ces huniers et ces perroquets si élégamment échancrés, et ces bonnettes qui se déploient sur ses flancs, gracieuses comme les ailes d’un cygne, et ces focs élégants qui semblent voltiger au bout de son beaupré, et sa ligne de vingt caronades de bronze, qui se dessine noire et blanche comme les bandes d’un damier !

Et puis, jamais la vapeur odorante de la myrrhe brûlant dans les cassolettes d’or, jamais la violette avec ses feuilles veloutées, jamais la rose et le jasmin distillés dans de précieux flacons de cristal n’approcheront du délicieux parfum qui s’exhalait de la cale de L’Épervier : quel odorant goudron, quel suave bitume !

Vrai Dieu ! mordieu ! c’est un beau brick que le brick L’Épervier !

Et puisque vous l’admirez endormi sur ses ancres, que diriez-vous donc si vous le voyiez donnant la chasse à quelque malheureux trois-mâts marchand ? Non ! jamais cheval de course écumant sous le frein n’a bondi avec autant d’impatience que L’Épervier, lorsque