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baume du sérail, brûlant dans des cassolettes de vermeil, mêlent leurs vapeurs aux douces exhalaisons des fleurs ; car, vivant pour les sens, je n’ai pas oublié l’olfaction…

Je me suis livré avec idolâtrie à mon goût pour les odeurs, goût malheureusement si dédaigné, si incompris ou si attaqué. J’ai réalisé mon rêve d’une sorte de gamme de senteurs, qui s’élèvent des plus faibles jusqu’aux plus chaudes, et dont l’aspiration cause une sorte d’ivresse, d’extase, qui ajoute à toutes les voluptés une volupté nouvelle et enchanteresse…

Et d’ailleurs comment ne pas vivre pour ainsi dire de parfums lorsqu’on habite Khios…, l’île des parfums ! l’île privilégiée des sultanes, qui seule fournit au sérail les essences de rose, de jasmin et de tubéreuse…

Khios, qui seule produit le précieux lentisque, dont l’odalisque rêveuse et ennuyée pétrit machinalement la gomme odorante entre ses dents d’ivoire ! Khios, dont le commerce même a un caractère d’élégance charmante, car elle trafique de tissus de soie, de teintures éclatantes, de fleurs, de fruits, d’oiseaux, de miel… Et ce sont de jeunes femmes et de jeunes filles, presque toujours belles d’une beauté antique et pure, qui recueillent les trésors de cette île for-