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sève généreuse et puissante manquant, la tige devait demeurer dans toute la triste nudité de sa noire écorce, et ne fleurir jamais.

Revenons à Hélène, bien qu’à cette heure quelques-uns de ces souvenirs me fassent encore rougir de honte.

C’était mon premier amour de cœur, et comme tout premier amour, il fut d’abord naïf, imprévoyant, étourdi, se laissant aller en aveugle au flot riant et pur de la passion, se berçant aux premières harmonies du cœur qui s’éveille, et cela, selon le vieil emblème mythologique, les yeux fermés pour ne pas voir l’horizon.

Ces trois mois d’insouciance de tout avenir furent néanmoins délicieux, et j’ai toujours plaisir à me rappeler les moindres détails de ces heureux moments.

Peu de temps après l’arrivée de madame de Verteuil et de sa fille à Serval, je demandai un jour à Hélène de monter à cheval, comme son amie, qui, pour sa santé, se livrait à cet exercice. J’avais fait venir d’Angleterre deux poneys fort doux, car Hélène était extrêmement peureuse. Avant que de la décider à tenter avec mademoiselle de Verteuil et moi quelques excursions hors du parc, il me fallut, pour ha-