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Il semble bâiller d’ennui, lui-même, en certaines de ses œuvres. Elles sont d’une longueur, d’une recherche, d’une subtilité insupportables. Elles sentent la folie. L’analyse y fait penser au délire, au scrupule, et le détail intérieur à la manie de l’infiniment petit. L’incohérence de Dostoïevski est piteuse, quand il ne trouve pas son ordre. Elle ricane, elle grimace. Quel sourire contraint ! Alors Dostoïevski va d’un pas terriblement lent ; il est obscur, diffus, ennuyeux comme une cave. Ses œuvres manquées, on dirait les fragments, les traits, les notes sans choix d’une œuvre qui n’a pas obtenu la grâce de l’unité. Plus l’analyse est curieuse, plus l’unité est nécessaire. Il en est de tous les détails et de tous les éléments intérieurs comme d’un corps chimique : tous les atomes y étant, il faut l’étincelle qui les assemble et qui les groupe : il faut que le cristal rencontre sa forme.

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Dostoïevski est d’un prodigieux désordre, quand il ne réussit pas à trouver son ordre.