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aux yeux, comme on les trouve dans le regard, le sourire, les caresses, les paroles de l’enfant. Nulle ironie : elle est trop déplacée en la matière. Nulle comparaison à l’âge mûr : elle détruit cette fleur impalpable de la naïveté. Et nulle affectation de puérilité : c’est un jeu qui sent le vieillard. Un tel ouvrage, avec le charme du chef-d’œuvre, à la portée d’une étude unique pour la science. La confidence de l’être enfantin, que nul enfant ne fait, parce qu’il manquerait précisément à l’enfance, s’il pensait à la faire, — Tolstoï l’a faite. Qui veut connaître les idées de ce raccourci d’homme, tout barbouillé encore du lait de la femme, sa méthode sentimentale, sa logique propre, absolue et instinctive, son être passionné et léger, où les pensées mêmes se jouent à l’état d’émotions, — n’a qu’à lire ce livre, — et n’a, du reste, à lire que celui-là.

Dès le début, on voit une nature puissante, rebelle à toute contrainte, sinon l’amoureuse, qui porte à l’extrême limite les forces mises en elle : avant toutes, une sensibilité en continuel mouvement, une sincérité de cœur qui n’a d’égale que la sincérité de l’esprit. Il éprouve, avec une rare plé-