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un objet de la bonne fabrique, — où vont toutes leurs préférences, quand elles ne les réservent point à quelque animal piaffant et lustré, qui tient le milieu entre le chanteur de bravoure et le coursier qu’il monte dans sa romance. — La conscience de sa laideur a longtemps tourmenté Tolstoï : comment ne pas savoir gré à un tel homme d’un aveu où se cache une profonde vérité, en général inaperçue, ou qu’on raille puérilement d’être puérile ? Il est bien vrai, comme dit Tolstoï, que rien n’importe peut-être plus à la vie entière que le sentiment qu’on a de sa laideur physique, ou de sa beauté. Pour lui, il fut un temps où il eût tout donné, en retour d’un air de tête séducteur, d’une joue longue, du teint et du poil soyeux d’un pair d’Angleterre, — et de cette tournure élégante, qui semble un aimant pour les désirs féminins, et qui forme un champ magnétique à l’attention, et — avouez-le — à l’envie des hommes.

Si Tolstoï avait besoin qu’on le justifiât d’avoir passé des lettres à l’Évangile, on aurait assez fait de comparer les portraits qu’on a de lui avant sa conversion à ceux qui l’ont suivie. L’or pur de