Page:Suarès - Tolstoï.djvu/30

Cette page a été validée par deux contributeurs.

phie. C’est toujours selon le canon social ; c’est toujours selon la norme de l’utilité publique. Or, il arrive au véritable artiste de ne pas s’en soucier. Si on accorde à Tolstoï son principe, il faut tout lui accorder. On ne peut vivre humainement que si l’on fait du bien à tous les hommes ; on ne le peut que si l’on vit pour tous, et ne vit pas pour soi. — Tolstoï fonde là-dessus son édifice. Ainsi, le sens de la vie, pour lui, n’est pas une recherche de l’ordre spéculatif ni de celui des sciences. C’est une recherche éthique, et l’explication d’un ordre de faits capital pour l’homme en société. De la même manière, le sens de l’Art est un problème, en quelque sorte politique.

Il parle souvent de l’Art, comme un paysan chaste, égaré dans un musée. Il a de cette âme naïve, qui se prend d’abord au sens réel des images ; il se l’est donnée, peut-être : sa volonté accorde, sans cesse, la théorie avec la vie. Il trouve un principe juste, que le malheur des temps a seul pu rendre douteux : à savoir que l’œuvre d’art doit être intelligible. Ce qui n’est pas clair pour l’esprit n’est pas humain, et n’est ni de l’Art, ni de la beauté. L’Art a toujours été une révélation du cœur