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combattu contre lui-même, au lieu de s’égarer en vains efforts. Où est l’homme un peu noble, qui ne se livre d’incessants combats ? — Le malheur est de perdre sa force, on ne sait au profit de quoi. Avec une humilité admirable, cet orgueilleux Tolstoï confesse qu’il ne sera jamais un parfait chrétien, — et qu’il ne l’ignore pas. Mais quoi ? dit-il : faites ce que je dis ; ne faites pas ce que je fais. Pour moi-même, je fais tout ce que je peux ; faites tout ce que vous pouvez. Ne dites donc point de ma doctrine, qu’elle est bonne seulement à un vieillard ; dites seulement qu’il est plus aisé au vieillard de la bien suivre. Il est vrai, pourtant, qu’un vieillard sain, robuste et vertueux est un modèle d’homme admirable à imiter. Il n’y a même rien de meilleur que lui, quand sa bonté est forte, qu’elle ne sent pas la faiblesse d’esprit, et ne peut aucunement passer pour un effet de la décrépitude.

Si les jeunes gens ne peuvent être des sages dépassionnés, il leur est du moins possible de tendre à la sagesse ; encore mieux de l’aimer, et de n’être pas indulgents à leurs passions, surtout aux plus viles, comme il leur arrive souvent, —