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ON ne doit pas rester sur l’image désolée que la maladie nous lègue d’un grand artiste lorsqu’elle le précipite, avant le temps, sur les sables du royaume immense. Pour l’artiste, la maladie est le seul ennemi trop impitoyable et trop sûr de vaincre : il peut tenir tête à tous, mais il ne saurait prévaloir contre cette perpétuelle trahison. Comme elle fait honte à l’amant de soi-même, la maladie accable le poète et le dépouille de son privilège : quelle que soit l’œuvre, et si pessimiste qu’elle paraisse, l’œuvre d’art véritable est toujours une œuvre de la puissance : dans l’excès même du désespoir, elle est ainsi un fruit de la santé et de la joie, une offrande de la vie à la vie et presque un hymne. Il est juste, il est doux d’honorer le poète en effaçant les rides et les ténèbres de son front.