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pieds. D’autres ajoutent qu’il fit jeter ce cadavre dans le Rhône, avec ceux de la femme et des enfants de son ennemi.

XII.

Une quantité innombrable de personnes du parti d’Albin, parmi lesquelles on comptait plusieurs des premiers citoyens de Rome et des femmes de la plus haute naissance, furent mises à mort, et leurs biens confisqués au profit du trésor public. Un grand nombre d’Espagnols et de Gaulois, les premiers de leur pays, périrent aussi pour la même cause. Enfin Sévère porta la solde des troupes à une somme qu’elles n’avaient encore reçue d’aucun prince. Grâce à ces confiscations, il laissa plus d’argent à ses fils qu’aucun autre empereur : il avait déjà tiré, depuis son avénement au trône, des sommes immenses des Gaules, des Espagnes et de l’Italie ; et c’est à lui que remonte l’usage qu’ont adopté ses successeurs d’avoir des intendants pour leurs revenus particuliers. Il vainquit, après la mort d’Albin, ceux qui étaient restés fidèles à sa cause, et il reçut vers le même temps la nouvelle qu’une légion de l’Arabie s’était déclarée en faveur de son rival. Après s’être ainsi vengé de sa révolte par la mort d’un grand nombre de personnes et par le meurtre de toute sa famille, il revint à Rome, plein de ressentiment contre le peuple et les sénateurs. Il fit l’éloge de Commode en plein sénat et devant le peuple assemblé ; il l’appela dieu ; il dit enfin, comme pour donner toutes les marques possibles de démence, que ce prince n’avait déplu qu’à des infâmes. Il osa ensuite se vanter de sa clémence, quoiqu’il se fût montré implacable, et qu’il eût fait périr les sénateurs que je vais nommer.

XIII.

Il fit tuer, sans procès, ceux dont les noms suivent, et qui étaient tous d’une noble origine : Mummius Secundinus, Asellius Claudien, Claudius Rufus, Vitalius Victor, Papius Faustus, Élius Celsus, Julius Rufus, Lollius Professus, Aruneulélus Cornélien, Antonin Balbus, Posthumius Sévère, Sergius Lustralis, Fabius Paulinus, Nonius Gracchus, Mustius Fabien, Caspérius Agrippinus, Céjonius Albin, Claude Sulpicien, Memmius Rufinus, Caspérius Émilien, Coccéius Vérus, Érucias Clarus, L. Stilon, Clodius Rufus, Egnatuléius Honoratus, Pétronius Junior, les Pescennius, Festus, Nératien, Aurélius, Matérien, Julien et Albin, les Cérellius, Macrin, Faustinien et Julien, Hérennius Népos, Sulpitius Canus, Valérius Catulinus, Novius Rufus, Claude Arabien, Marcus Asellion. Assassin de tant de citoyens illustres (car la plupart d’entre eux étaient des consulaires ou d’anciens préteurs, et tous des hommes du plus grand mérite), il est regardé comme un dieu par les Africains.

XIV.

Il accusa Cincius Sévère d’avoir voulu l’empoisonner, et il le fit périr pour ce prétendu crime. Il exposa aux lions Narcisse, qui avait étranglé Commode. Il donna la mort à un nombre infini d’hommes obscurs, sans compter ceux qui la reçurent dans les combats. Voulant gagner ensuite l’affection des citoyens, il fit passer des particuliers au fisc le soin de fournir les voitures publiques. Il fit donner par le sénat le nom d’Antonin à son fils Bassien, qu’il avait déjà fait César, et il lui décerna les ornements impériaux. Le bruit d’une guerre contre les Parthes s’étant dissipé, il érigea, de sa seule autorité[1], des statues à son père, à sa mère, à son aïeul et à sa première femme. Il conçut contre Plautien, son plus intime ami, une telle haine quand il

  1. Ce droit appartenait au sénat.