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il porta une loi qui déclarait valables les testaments auxquels il n'en aurait pas été substitué d'autres par le testateur. Il déclara en même temps qu'il n'accepterait aucun héritage qui lui serait laissé par adulation, ou d’après un droit douteux, et au préjudice des héritiers légitimes et des parents. « Il vaut mieux, pères conscrits, disait-il dans le préambule de son sénatus-consulte, être pauvre en gouvernant la république, que de s'élever au comble des richesses par l'injustice et le déshonneur. » Il donna les congiaires et les donatifs promis par Commode; il pourvut avec un soin particulier aux approvisionnements. L'état du trésor public, où il n'avait trouvé, disait-il, qu'un million de sesterces[1], le força, malgré ses promesses, d'exiger les impôts que Commode avait établis; et le consulaire Lollianus Gentianus lui ayant reproché de manquer à sa parole, il allégua pour excuse la nécessité. Il fit vendre à l'enchère ce qui avait appartenu à Commode, jusqu'à ses mignons et à ses concubines, excepté les personnes qui paraissaient avoir été amenées de force dans le palais. Plusieurs de ceux qui furent ainsi vendus rentrèrent dans la suite au service de Pertinax : ils recréèrent sa vieillesse, et parvinrent, sous les empereurs suivants, jusqu'à la dignité de sénateur. Les ignobles bouffons qui avaient pris, pour plaire à Commode, les noms les plus obscènes, furent dépouillés de leurs biens et vendus. Les sommes considérables qu'il retira de cette vente furent distribuées, comme donatif, aux soldats.

VIII.

Il exigea aussi des affranchis la restitution des biens qu'ils devaient aux libéralités de Commode. La vente du mobilier de ce prince fut surtout remarquable en ce que l'on y vit des vêtements tissus de soie et rehaussés de fils d'or, une infinité de tuniques et de manteaux grands et petits, des tuniques à manches à la façon des Dalmates, des sayons à franges, des chlamydes de pourpre à la grecque, des vêtements de guerre, des capuchons comme en portent les Bardes, des toges, des armes de gladiateurs chargées d'ornements d'or et de pierres précieuses, des épées comme la fable en prête à Hercule, des colliers de gladiateurs, des vases d'or fin, d'ivoire, d'argent, et de bois de citronnier; des coupes de la même matière et représentant des sujets obscènes ; des vases du Samnium, où l’on faisait chauffer la résine et la poix qui servaient à épiler les mignons. On y voyait aussi des voitures d'une nouvelle invention, et dans lesquelles un mécanisme assez compliqué, mais fort ingénieux, qui s'appliquait aux roues et aux sièges, permettait, en les tournant, ou de se mettre à l'abri du soleil, ou de se ménager à propos un air frais; d’autres mesuraient seules le chemin parcouru, indiquaient les heures, et étaient accommodées aux plaisirs du prince. Pertinax rendit à leurs maîtres ceux qui s'étaient enfuis de chez eux pour se réfugier à la cour. II réduisit à une juste mesure les frais immenses de la table impériale, et il supprima toutes les somptuosités de Commode. L'esprit d'économie, dont l’empereur donnait l'exemple, gagna bientôt toutes les classes, et fit baisser le prix de tous les objets. Il congédia, en outre, les personnes inutiles, et diminua ainsi sa dépense de moitié.

IX.

Il fixa des récompenses pour les soldats

  1. 193,750 fr.