dénoncé à celui-ci ce qui se faisait, il l’accusa d’aspirer au trône, l’en rendit suspect, et le fit périr, avec beaucoup d’autres qui étaient dans ses intérêts. Le préfet Ebutien fut de ce nombre. Cléandre fut mis à sa place, ainsi que deux autres qu’il choisit lui-même. On vit alors, pour la première fois, trois préfets du prétoire, et parmi eux un affranchi qui fut appelé le secrétaire du poignard.
VII.
Mais la fin de Cléandre fut digne de sa vie. Car, après qu’il eut fait périr Arrius Antonin sur de fausses accusations, et pour servir la vengeance d’Attale, condamné par Arrius pendant son proconsulat d’Asie, Commode, ne pouvant plus tenir, à la fin, contre la haine que le peuple portait à ce favori, le lui abandonna. Apolaustus et quelques autres affranchis de la cour furent massacrés comme lui. Cléandre avait eu commerce avec les concubines du prince, et en avait eu des fils qui, après sa mort, furent tués avec leurs mères. Julien et Régillus lui succédèrent ; mais Commode ne tarda pas à leur faire aussi donner la mort. Après eux, il fit périr, avec leurs parents, Servilius et Dulius, de la maison des Silanus ; ensuite Anitius Lupus, puis Mamertinus et Sura, de la famille des Pétronius, et Antonin, fils de Mamertinus et de sa sœur ; et après ceux-là, six consulaires à la fois, Allius Fuscus, Célius Félix, Lucéius Torquatus, Lartius Euripianus, Valérius Bassianus et Pactuléius Magnus, avec leur famille. Il envoya tuer en Asie le proconsul Sulpitius Crassus et Julius Proculus, avec leurs parents, ainsi que le consulaire Claude Lucanus ; en Achaïe, Faustine Annia, cousine germaine de son père, et une infinité d’autres personnes. Ayant épuisé, dans ses débauches, toutes les ressources de l’empire, il avait encore résolu la mort de quatorze citoyens.
VIII.
Lorsque Commode eut désigné consul l’adultère de sa mère, le sénat, pour se moquer sans doute, lui donna le nom de Pieux, et quand il eut fait mourir Pérennis, celui d’Heureux. On dit qu’au milieu de ce massacre des citoyens, ce pieux, cet heureux empereur supposa, comme un autre Sylla, une conspiration contre ses jours, afin d’avoir à immoler à la fois un plus grand nombre de victimes. Il n’y eut pourtant pas d’autre conjuration que celle d’Alexandre, qui se tua ensuite avec ses complices, et celle de Lucilla, sœur de Commode. Les flatteurs donnèrent aussi à ce prince le surnom de Britannique, parce que les Bretons avaient voulu élire un autre empereur. Il reçut encore le titre d’Hercule romain, pour avoir tué des bêtes féroces dans l’amphithéâtre de Lanuvium. C’était un de ses exercices habituels que de tuer, chez lui, des animaux. Il poussa la démence jusqu’à vouloir que Rome fût appelée colonie de Commode, et cette monstrueuse fantaisie lui vint, dit-on, au milieu des voluptés où il se plongeait avec Martia. Il voulut aussi conduire dans le cirque des chars attelés de quatre chevaux. Il se montra en public avec une dalmatique, et il donna, dans ce costume, le signal du départ des quadriges. Lorsqu’il proposa au sénat de changer le nom de Rome en celui de Commode, non seulement cette assemblée y consentit (probablement par dérision), mais elle adopta encore pour