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mettre des matelas sous les danseurs de corde, après la chute de l’un d’eux ; et de là vient l’usage d’étendre aujourd’hui sous la corde un filet.

XIII.

Pendant la guerre des Parthes, éclata celle des Marcomans ; mais l’habileté des généraux qui étaient sur les frontières parvint à la retarder jusqu’à la fin de la guerre d’Orient. Vérus était de retour, après une absence de cinq années, quand Marc-Aurèle fit comprendre au peuple, malgré la famine qui régnait alors, le besoin de faire la guerre, et exposa dans le sénat la nécessité qu’il y avait que les deux empereurs y assistassent. Telle était la terreur qu’inspirait une expédition contre les Marcomans, qu’il dut commencer par faire venir de tous côtés des prêtres, par accomplir les cérémonies en usage même chez les étrangers, par purifier, de toutes les manières, la ville de Rome ; ce qui retarda son départ pour l’armée. Il célébra aussi pendant sept jours, et selon le rite romain, les fêtes du lectisterne.

Mais la peste faisait de si grands ravages qu’on fut obligé d’employer toutes sortes de voitures au transport des cadavres. Les deux empereurs firent alors des lois très sévères touchant les inhumations et les tombeaux. Ils défendirent d’en élever où on le voudrait ; règlement qui s’observe encore aujourd’hui. Ce fléau enleva plusieurs milliers de personnes, et parmi elles beaucoup de citoyens du premier rang. Marc-Aurèle fit ériger des statues aux plus distingués, et il ordonna, par un décret plein de bonté, de faire aux frais de l’État les funérailles des moindres citoyens.

A cette époque parut un fourbe qui, ayant formé avec quelques complices le projet de piller Rome, annonça que le jour où il parlerait à la foule du haut d’un figuier sauvage, dans le champ de Mars, un globe de feu descendrait du ciel et occasionnerait la fin du monde, si, au moment où il tomberait lui-même du figuier, il se changeait en cigogne. Le jour marqué, il tomba en effet de cet arbre, en lâchant une cigogne qu’il avait dans son sein. L’empereur se le fit amener, et, sur l’aveu de son imposture, lui accorda sa grâce.

XIV.

Les deux princes partirent donc en costume militaire, pour s’opposer aux ravages des Victovales et des Marcomans, auxquels s’étaient joints d’autres peuples, qui fuyaient chassés par des barbares plus éloignés, et qui nous menaçaient aussi de la guerre, si nous refusions de les recevoir dans nos provinces. Le départ des empereurs eut d’heureux résultats ; car à peine furent-ils arrivés à Aquilée, que la plupart de ces rois se retirèrent avec leurs peuples, et firent périr les auteurs de ces troubles. Les Quades, qui avaient perdu leur roi, déclarèrent ne vouloir laisser la couronne à celui qui avait été élu, que si cette élection était approuvée par nos princes. Lucius, qui n’était parti qu’à regret, voyant la plupart de ces peuples envoyer des députés pour solliciter leur pardon, était d’avis de s’en retourner, parce que le préfet du prétoire, Furius Victorin, était mort, et qu’une partie de l’armée avait péri. Marc-Aurèle, persuadé, au contraire, que la retraite des barbares et leurs dispositions pacifiques n’étaient qu’un artifice pour éloigner d’eux ce formidable appareil de guerre, fut d’avis de les poursuivre. Après avoir passé les Alpes, les deux princes se portèrent en avant, et firent tous les arrangements nécessaires à la sûreté de l’Italie et de l’Illyrie. Marc-Aurèle consentit, sur les instances de son