Page:Suétone - Les écrivains de l’Histoire Auguste, 1845.djvu/360

Cette page n’a pas encore été corrigée

qu’il fallait quelquefois le forcer d’assister aux chasses du cirque, de se montrer au théâtre et de présider aux spectacles. Il apprit aussi la peinture, et eut pour maître Diognète. Il aimait le pugilat, la lutte, la course, et la chasse aux oiseaux : il était fort habile à la paume et à la chasse. Mais le goût de la philosophie le détourna de tous ces amusements et lui donna beaucoup de gravité, sans lui faire perdre toutefois l’agrément qu’il mettait dans son commerce avec ses amis, et même avec les personnes qu’il connaissait moins. Il était sobre sans ostentation, bon sans faiblesse, et grave sans morosité.

V.

Lucius César étant mort, Adrien dut songer de nouveau à se donner un successeur. Trouvant Marc-Aurèle trop jeune, car il n’avait que dix-huit ans, il choisit Antonin le Pieux, mari de la tante de Marc-Aurèle, mais à condition qu’Antonin adopterait Marc-Aurèle, et celui-ci Lucius Commode. Vérus, le jour même de son adoption, rêva qu’il avait des épaules d’ivoire, et qu’ayant essayé si elles pouvaient porter un fardeau, il les trouva plus fortes que les siennes. Il fut plus chagrin que joyeux d’apprendre qu’Adrien l’avait adopté, et ce fut à regret qu’il quitta les jardins de sa mère pour le palais de l’empereur. Les personnes de sa suite lui ayant demandé pourquoi cette glorieuse adoption le rendait triste, il leur représenta les maux attachés au souverain pouvoir. C’est alors seulement qu’au lieu d’Annius il fut appelé Aurélius, parce que le droit d’adoption l’avait fait passer dans la famille Aurélia, c’est-à-dire dans celle des Antonins. Il fut donc adopté à l’âge de dix-huit ans, sous le second consulat d’Antonin, son père ; et Adrien lui ayant fait accorder une dispense d’âge, on le désigna questeur. Malgré cette alliance avec une famille souveraine, il eut pour tous ses parents le même respect qu’il leur témoignait auparavant. Aussi économe, aussi laborieux dans le palais que dans sa maison, il ne voulut agir, parler, penser même, que d’après les principes de son père.

VI.

Lorsque Antonin le Pieux alla chercher les restes d’Adrien mort à Baïes, Marc-Aurèle fut laissé à Rome : il rendit les derniers devoirs à son aïeul, et donna, comme un questeur ordinaire, un combat de gladiateurs. Aussitôt après la mort d’Adrien, Antonin le Pieux, déclarant nulle la promesse de mariage faite par Marc-Aurèle à la fille de Lucius Céjonius Commode, lui fit proposer par l’impératrice la main de sa fille. Marc-Aurèle, se trouvant encore trop jeune, demanda du temps pour y penser. Cependant l’empereur le désigna, quoiqu’il fût encore questeur, pour être son collègue au consulat ; il lui conféra en même temps le titre de César, et le créa sévir de cavalerie. Il s’assit à côté de lui le jour où celui-ci donna les jeux séviraux avec ses collègues ; il lui assigna pour demeure le palais de Tibère, l’entoura, malgré lui, de tout l’appareil de la puissance, le reçut, d’après un décret du sénat, dans les collèges des prêtres et, en prenant possession de son quatrième consulat, le désigna consul pour la seconde fois. Ainsi comblé d’honneurs, et admis dans tous les conseils de son père, qui voulait le former au gouvernement de la République, il n’en montra