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à Antonin pour déclarer s’il agréait l’adoption. La loi de cette adoption fut que, comme Adrien adoptait Antonin, celui-ci, à son tour, adopterait M. Antonin, fils de son beau-frère, et L. Vérus, connu dans la suite sous le nom de Vérus Antonin, et fils de cet Elius Vérus adopté par Adrien. Antonin fut adopté le cinq des calendes de mars. Il remercia son père, en présence du sénat, de sa bienveillance à son égard, et il fut nommé collègue de l’empereur dans le commandement proconsulaire et la puissance tribunitienne.

Le premier trait qu’on cite de lui depuis son adoption, c’est que sa femme ayant blâmé sa réserve dans je ne sais quelle largesse faite à ses gens, il lui dit : « Sachez donc, insensée, que, depuis que nous sommes appelés à l’empire, ce que nous avions ne nous appartient plus. » Il donna, sur sa propre fortune, un congiaire aux soldats et au peuple, et tout ce qu’Adrien avait promis. Il contribua, pour une grande part, à l’achèvement des ouvrages commencés par ce prince. Il remit à l’Italie tout le coronaire offert à l’occasion de son adoption, et la moitié aux provinces.

V.

II fut religieusement soumis à Adrien, pendant toute la vie de cet empereur. Celui-ci étant mort à Baies, il transporta ses restes à Rome avec de grandes marques de respect et de vénération, et il les déposa dans les jardins de Domitia. Il le plaça même au rang des dieux, malgré une opposition unanime. Il permit au sénat de donner à sa femme Faustine le titre d’Augusta et il accepta le surnom de Pieux. Il agréa les statues qu’on décerna à son père, à sa mère, à ses aïeux et à ses frères, qui étaient déjà morts. A l’exception des jeux du cirque, destinés à célébrer l’anniversaire de sa naissance, il refusa tous les honneurs qu’on voulut lui rendre. Il consacra un bouclier magnifique à Adrien et lui donna des prêtres. A son avénement au trône, il ne remplaça aucun de ceux à qui cet empereur avait donné des charges. Il était si constant dans ses choix, qu’il laissa pendant sept ans et même pendant neuf, dans leurs provinces, les gouverneurs qui s’y conduisaient bien.

Il fit plusieurs guerres par ses lieutenants. C’est ainsi que Lollius Urbicus vainquit les Bretons, et fit élever un second mur de gazon après avoir repoussé ces barbares. Les Maures furent réduits à demander la paix. Les gouverneurs de provinces et ses généraux soumirent les Germains, les Daces, plusieurs autres peuples, et les Juifs, qui s’étaient révoltés. Il étouffa aussi des rébellions en Achaïe et en Égypte.

VI.

Il réprima plus d’une fois les Alains, qui se remuaient. Il prescrivit à ses délégués de mettre beaucoup de douceur dans la perception des impôts, et il fit rendre un compte exact de leur conduite à ceux qui sortaient des bornes de la modération. On ne le vit jamais se réjouir d’un profit qui était une charge pour les provinces. Il écoutait avec bonté les plaintes qu’on lui faisait de ses intendant. Il demanda au sénat la grâce de ceux qu’Adrien avait condamnés, disant que ce prince la leur eût donnée, s’il eût vécu. Il tempéra par une extrême affabilité la majesté impériale, qui ne fit qu’y gagner, au grand regret des courtisans, lesquels ne pouvaient plus, sous un prince habitué à tout faire par lui-même, ni effrayer les peuples, ni vendre en secret les emplois. Il eut, empereur, autant d’égards pour le