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général avec les grammairiens, les rhéteurs, les musiciens, les géomètres, les peintres, les astrologues ; mais Favorin paraît l’avoir emporté sur tous dans son amitié. Adrien fit renoncer à leur profession, après les avoir enrichis et traités honorablement, les maîtres qui y semblaient inhabiles.

XVI.

Ceux qu’il avait eus pour ennemis avant de parvenir au trône, il se contenta de les oublier quand il y fut monté, et, le jour où il fut fait empereur, il dit à l’un de ceux qui lui avaient fait le plus de mal : « Vous l’avez échappé. » Il donnait toujours, à ceux qu’il appelait lui-même sous les drapeaux, des chevaux, des mulets, des vêtements, de l’argent, en un mot tout l’attirail nécessaire. Aux Saturnales et aux Sigillaires, il envoyait souvent des cadeaux à ses amis, sans qu’ils s’y attendissent ; il en recevait aussi de leur part avec plaisir, et leur en offrait à son tour. Pour découvrir les fraudes de ses pourvoyeurs, il se faisait apporter, les jours où il donnait de grands repas, les plats des autres tables, même des dernières. Il s’attacha tous les rois par ses largesses.

Il se baignait souvent en public et avec tout le monde ; habitude qui donna lieu à un badinage encore usité dans les bains. Voyant un vétéran, qu’il avait connu autrefois dans l’armée, se frotter le dos et le reste du corps contre le marbre, il lui demanda pourquoi il se frictionnait de cette manière ; et, sur la réponse de ce vétéran, qu’il n’avait pas d’esclaves à qui le commander, il lui donna des esclaves et de l’argent. Le lendemain, plusieurs vieillards se mirent à se frotter aussi contre le marbre du bain, pour attirer sur eux la libéralité du prince. Il les fit venir, et leur dit de se rendre mutuellement ce service.

Il faisait parade de son affection pour le peuple. Il avait un tel goût pour les voyages, qu’il voulut voir par lui-même tous les endroits de l’univers dont il avait lu la description. Il supportait fort patiemment, et tête nue, le froid et toutes les intempéries. Il montra beaucoup de déférence pour un grand nombre de rois. Il acheta même la paix de la plupart d’entre eux, fut mépriséde quelques uns, et fit à plusieurs de magnifiques dons. Mais il n’en traita aucun aussi libéralement que le roi des Hibères, qui, sans compter de riches présents, reçut de lui un éléphant et une cohorte de cinq cents hommes. Pharasmane lui-même lui ayant, à son tour, envoyé de superbes cadeaux, entre autres des chlamydes ornées d’or, Adrien, pour se moquer de l’envoi, fit revêtir de pareilles chlamydes trois cents criminels, qu’il exposa ensuite dans l’arène.

XVII.

Lorsqu’il rendait la justice, il appelait à son conseil non seulement ses amis et les personnes de sa suite, mais aussi les meilleurs jurisconsultes, tels que Jules Celse, Salvius Julien, Nératius Priscus, et d’autres encore, après avoir toutefois demandé pour ce choix l’approbation du sénat. Il statua, entre autres choses, qu’on ne pourrait dans aucune cité démolir des maisons, pour en transporter dans une autre ville les matériaux, quels qu’ils fussent. Il accorda aux enfants des proscrits le douzième des biens de leurs pères. Il n’admit point les accusations de lèse-majesté. Il n’accepta jamais les héritages des citoyens qui lui étaient inconnus, ni de ceux qu’il connaissait, si ceux-ci avaient des enfants. Il décida