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placé le lieu même où la fille des Pharaons retira Moïse des eaux ; à cinq cents pas se dressent les ruines encore imposantes de la mosquée d’Amrou et, tout auprès, des Coptes font voir une grotte où la mère de Jésus s’est reposée. Quatre religions, quatre sociétés, et lesquelles ! dans ce coin de terre que mon regard embrasse. Sauf l’Inde et la Chine peut-être, on ferait l’histoire du monde en suivant celle des idées qui sont parties d’ici. Aussi je ne crois pas qu’aucun lieu soit plus propre à vous transporter au centre de l’immensité des temps et à vous faire apercevoir d’ensemble la vie de l’humanité.

Ajoutez que c’est en face d’une nature incomparable, délicieuse à la fois et grandiose, que ces méditations vous saisissent. L’île verdoyante de Roudah se dresse entre les deux bras du fleuve comme une image de la paix et de la fécondité ; on se demande, en voyant ce sourire du Nil, si le paradis terrestre fut bien entre les rives de l’Euphrate ; de petits chemins qu’ombragent les sycomores et les acacias épineux la parcourent dans tous les sens, la tourterelle y chante ses amours sur la cime des palmiers et tout un peuple d’ibis, de ceux-là mêmes qui furent sacrés, picore aujourd’hui dans les empreintes laissées par le pas des bestiaux. Sur la rive gauche s’étale, abrité par des plantations nombreuses, le village de Gizeh ; non loin serpente une allée de sombres lébas dont les gousses luisent au soleil comme des fruits d’or ; puis, une vaste étendue de champs toujours verts ; enfin, mystérieuses et bleues, les trois grandes pyramides…

Et la description reprend, allant de la campagne au port du Vieux-Caire, à un bazar, au musée de Boulaq ; pourtant, c’est le paysagiste qui domine ; cette nature égyptienne trotte encore dans la tête du président de la Chambre ; il nous disait cet hiver : « J’en ai la nostalgie ;