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l’action directe du soleil sont éclairées de tels reflets qu’elles semblent elles-mêmes autant de foyers lumineux. Je tourne alors le dos au fleuve et me dirige vers ce décor éblouissant ; c’est la fête des yeux ; bientôt, je la quitte à regret, je rebrousse chemin et suis quelque temps les pentes du Mokattam où le vent m’aide à supporter la chaleur ; peu à peu, j’arrive aux ruines du Vieux-Caire ; à travers les décombres amoncelés et couverts de sable, je gagne la mosquée d’Amrou ; j’aime ces lieux, il y fait frais ; la fontaine aux ablutions précède le sanctuaire comme pour rappeler, mémento qui n’est pas de luxe en Orient, que la propreté est la première de toutes les vertus ; sous l’immense colonnade encore debout sont étendues des nattes, je vais m’y reposer, je m’accoude sur la dernière marche de la chaire, et mes pieds viennent affleurer la base de la colonne que le commandeur des croyants envoya de Médine à son lieutenant sur l’aile des zéphirs. Avec les oreilles de la foi, j’entendrais murmurer la source qui vient du puits Zim-Zim à la Mecque ; mais vous connaissez toutes ces légendes…

Le passage suivant montrera mieux encore combien les paysages égyptiens l’avaient saisi ; l’ami auquel il écrivait était sensiblement plus âgé que lui ; Brisson essayait de parler histoire, philosophie, religion, mais il se laissait toujours entraîner.

Je reprendrai, si vous le permettez, de mon lieu d’exil, un commerce d’idées qui m’a toujours été précieux. De fait, il ne faut pas moins que votre entretien pour remettre l’ordre dans mon esprit, où se heurtent et s’entrechoquent présentement tant de choses. Jugez un peu : j’ai les Pyramides devant mes fenêtres et je vois chaque soir le soleil se coucher entre Chéops et Chéphren ; à cent mètres de mon habitation, la légende a