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mente pour le surplus les notes et les indications laissées par le poète :

Tommy Atkins, ô Tommy Atkins ! le poète a rencontré, dans les rues de Versailles, le cortège funèbre d’un des premiers soldats anglais morts en France ; de compassion et de respect il a frissonné ; il regarde ; il se rend compte ; il imagine quel pouvait être ce malheureux, ses origines, sa famille, ses amours, aussi sa misère probable, sa loyauté, ses espérances sans cesse déjouées. Puis, par un retour sur soi-même, il retrouve l’image éternelle de la commune destinée, et il écrit ces lignes désenchantées, douloureuses et fraternelles :

Je finis mon pauvre poème comme le Destin a fini ta pauvre vie. Dédions-nous tous au néant, pour que nos rêves survivent. Ton nom n’est rien, le mien est encore moins. Tout ce que nous savons de toi, c’est que tu es venu mourir à Versailles, la ville du grand Roi.

Mais il s’agit de n’être point ici dupe d’une apparence, si l’on désire pénétrer la vraie pensée de Merrill. Il ne s’est pas incliné au pessimisme, bien au contraire : quelque chose existe, de plus vaste, de plus élevé, d’éternel, qui ne se confond point aux incidents quotidiens des existences individuelles, mais qui, sans s’altérer jamais, en émane et s’ajoute aux réserves de beauté, de grandeur, de bonté, dont