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lant son ba, be, bi, bo, bu, dans un coin de l’atelier saupoudré de sciure de bois, tandis que la mère prépare la bonne soupe fumante et parfumée, et que le père taille les sabots qui porteront les uns au bonheur, les autres au malheur, celui-ci à l’amour et celui-là à la mort, tous ces sabots qui taperont et claqueront sur les routes obscures de la destinée.

L’enfant se distingua de bonne heure à l’école et mérita une bourse d’études. Il entra au lycée de Montluçon, où il eut comme condisciple et ami le futur romancier Marcel Batilliat. Philippe serait vite devenu le souffre-douleur de sa classe sans la robuste protection de celui-ci. Chose étrange, il ne manifesta aucun goût pour la littérature pendant ces longues et ternes années de lycée. Son ambition d’enfant — je tiens ce détail de M. Marcel Batilliat — était de devenir général d’artillerie ! Il passa même avec succès les examens préparatoires de l’École Polytechnique ; mais on finit par lui faire comprendre qu’il manquait trop de prestance pour caracoler dignement derrière les batteries fumantes. Il connut alors des moments difficiles à Paris. L’ironique hasard voulut que ce petit homme timide et doux élût domicile rue des Mauvais-Garçons, qu’il quitta pour s’installer définitivement dans l’Île Saint-Louis, où il retrouvait, au beau milieu de