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un éditeur, nous paraissons, nous épatons la Presse, nos trois cents exemplaires augmentent, avec une rapidité macabre et rollinesque (les Névroses venaient de paraître) et se vendent par milliers. Sarcey nous invite à dîner et ne nous sert pas de l’oie rôtie et des haricots verts (notre menu habituel au Quartier), nous sommes ceints d’une auréole de gloire. Darzens est seigneur et maître de toutes les filles du Quartier, nous, des autres de tous les théâtres en laissant l’Odéon à Lefeuve et les Nouveautés à Ghilbert. Seulement, j’ai cinquante centimes dans ma poche et il faut cent trente francs. »

N’est-ce pas jeune et charmant ?

À propos d’Éphraïm Mikhaël je trouve intéressant de rappeler que dès 1884, au cours d’une promenade dans le jardin du Luxembourg, il me fit la théorie du vers libre, et me lut des vers libres, que d’ailleurs il ne publia jamais. Ceci n’enlève rien à la gloire de M. Gustave Kahn et de Mme Marie Krysinska, qui se disputent la priorité d’invention de cette forme. Mais cela prouve au moins qu’on cherchait partout, à cette époque, sans s’être donné le mot, à se libérer des règles trop étroites de la prosodie classique. L’idée du vers libre était, comme on dit, dans l’air.

Chère époque de Sturm und Drang ! Je ne