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posé à expliquer naturellement, comme les légendes bibliques, les légendes grecques qui offraient des points de comparaison. Loin de là, on aima mieux peser sur l’autre plateau de la balance, et l’on commença à considérer comme des mythes plusieurs narrations de la Bible. Après que Semler eut parlé d’une espèce de mythologie judaïque, et appelé des mythes l’histoire de Samson et d’Esther[1] ; après que Eichhorn eut procédé, comme il a été dit ; Gabler[2], Schelling[3] et d’autres établirent l’idée du mythe comme une idée tout à fait générale, et valable pour l’histoire primitive, tant sacrée que profane, d’après le principe de Heyne : A mythis omnis priscorum hominum cum historia tum philosophia procedit[4] ; et Bauer osa même (en 1820) faire paraître une Mythologie hébraïque de l’Ancien et du Nouveau Testament. La plus ancienne histoire de tous les peuples, dit Bauer, est mythique : pourquoi l’histoire hébraïque ferait-elle seule exception, quand un simple coup d’œil jeté sur les livres saints montre qu’ils contiennent aussi des portions mythiques ? En effet, un récit, ainsi que Bauer l’explique d’après Gabler et Schelling, est reconnaissable comme mythe, quand il provient d’un temps où il n’y avait pas encore d’histoire écrite, mais où les faits n’étaient transmis que par une tradition orale[5] ; quand des objets placés absolument ou relativement en dehors de toute expérience, par exemple des faits d’un ordre surnaturel, ou tels qu’en raison des circonstances personne n’a

  1. Ausführliche Erklærung über theol. Censuren, Vorrede. Von freier Untersuchung des Kanon. 2, S. 282.
  2. Dans Einleitung zu Eichhorn’s Urgesch., 2, S. 481 ff., 1792.
  3. Sur les mythes, les légendes historiques et les pensées philosophiques du plus ancien monde ; dans Paulus, Memorabilien, 5. Stück, S. 1 ff., 1793.
  4. Apollod. Athen. Biblioth. libri tres et fragmenta curis secundis illustr. Heyne, p. XVI.
  5. Comme une tradition orale qui ne compte qu’un petit nombre d’intermédiaires offre plus de sûreté historique, Hoffmann invoque, pour la crédibilité de l’histoire primitive de l’Ancien Testament, la grande longévité des premiers hommes ; Adam ayant encore vécu 156 ans avec Lamech, père de Noé, Noé encore 60 ans avec Abraham, et les 300 ans entre Jacob et Moïse étant remplis par trois ou quatre générations seulement (S. 54). On ne sait vraiment pas comment on doit prendre un pareil argument.