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des êtres supérieurs ; et ce n’est pas le peuple seul qui était dans cette croyance : les hommes distingués dont il est ici question n’avaient eux-mêmes aucun doute sur ce sujet, et se vantaient, avec une pleine conviction, de relations mystérieuses avec la divinité. Eichhorn remarque que personne ne peut avoir rien à objecter contre la tentative de résoudre en événements naturels les récits de l’histoire mosaïque, et en même temps il accorde les préliminaires de l’auteur des Fragments de Wolfenbüttel ; mais il ne veut pas en conclure avec cet écrivain que Moïse ait été un imposteur, et il repousse cette conclusion comme téméraire et injuste. Ainsi Eichhorn, avec les interprètes naturalistes, enleva à l’histoire biblique son fond immédiatement divin : seulement le reflet surnaturel qui y est répandu, il l’attribua, non, comme eux, aux couleurs trompeuses que la fraude y avait mises à dessein, mais à l’effet naturel de la manière dont la lumière de l’antiquité s’y projetait.

Dès lors, avec ces principes, Eichhorn essaya d’expliquer les histoires d’un Noé, d’un Abraham, d’un Moïse. La vocation de ce dernier, du point de vue de son temps, n’est pas autre chose que la pensée, longtemps méditée par ce patriote, de délivrer son peuple, pensée qui, se remontrant à son esprit dans un rêve avec une nouvelle vivacité, fut prise par lui pour une inspiration divine. La fumée et la flamme sur le Sinaï, lors de la promulgation de la loi, furent un feu qu’il alluma sur la montagne pour aider à l’imagination de son peuple, et avec lequel, par hasard, coïncida un violent orage ; l’apparence lumineuse de sa face était une suite de son grand échauffement, et Moïse lui-même, qui en ignorait la cause, y vit, avec le peuple, quelque chose de divin.

Eichhorn fut plus retenu dans l’application au Nouveau Testament de ce mode d’explication, et ce furent principalement quelques faits de l’histoire des apôtres qu’il se permit