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INTRODUCTION.

développement de la doctrine mythologique pour
l’histoire évangélique.

§ Ier.


Formation nécessaire de différents modes d’expliquer les histoires sacrées.

Partout où une religion, s’appuyant sur des documents écrits, agrandit son domaine dans le temps et dans l’espace, et accompagne ses adhérents à travers un développement et une civilisation de plus en plus variée et élevée, il se manifeste plus tôt ou plus tard un désaccord entre ces vieux documents et la nouvelle culture de ceux qu’on y renvoie comme à des livres sacrés. Tantôt ce désaccord ne touche qu’à des choses peu essentielles, à des choses de forme, par exemple quand l’expression et l’exposition dans ces livres ne sont pas trouvées conformes au sujet ; tantôt il porte sur des points capitaux, les idées et les opinions fondamentales de ces livres ne suffisant plus aux progrès de la culture intellectuelle. Aussi longtemps que ce désaccord n’est pas assez considérable ou n’a pas pénétré assez avant dans la conscience publique pour amener une rupture complète avec ces documents, en tant que sacrés, on voit s’établir et se conserver, parmi ceux qui sentent plus ou moins clairement la dissidence, un travail de conciliation qui procède par l’explication des Écritures saintes.

Une partie capitale de tout document religieux est une histoire sacrée, c’est-à-dire une série d’événements où la divinité intervient dans l’humanité sans intermédiaire, et où les idées se montrent dans une incorporation immédiate[1]. Mais

  1. Je donne aux mots immédiat et médiation le sens dans lequel George, Ueber Mythus und Sage, p. 78, dit du miracle : « C’est l’intervention d’une idée isolée dans les phénomènes, sans prendre en considération l’enchaînement total. »