Page:Strauss David - Vie de Jésus, tome 1, Ladrange 1856.djvu/49

Cette page a été validée par deux contributeurs.

geantes. Or, comme l’a dit avec profondeur, Royer-Collard, l’ordre est en péril tant qu’il est un mystère.

À qui pèsera et développera en son esprit ce que je viens de dire avec tant de brièveté dans cette Préface, il apparaîtra qu’une si complète réforme, qui rend un même enseignement commun à toutes les classes, est solidaire d’une nouvelle croyance ; seule, cette croyance associera à l’œuvre d’éducation tant de forces aujourd’hui dispersées. Et d’ailleurs, où trouverait-on, en dehors d’elle, rien qui puisse constituer le fond où l’on bâtisse, c’est-à-dire le fond où l’on enseigne ? Si l’on s’en écarte, on retombe nécessairement dans les dissidences interminables qui ont amené la perturbation moderne, et dont tout s’efforce de sortir ; on retombe dans ce dilemme insoluble d’un système général qui n’est pas compatible avec les sciences particulières, et de sciences particulières qui ne pourront que miner le système général sans le remplacer. Mais sitôt qu’on a entrevu le point culminant, couronnement du savoir et de l’histoire, alors les choses se concilient, s’apaisent, se règlent ; car le dogme se confond avec la conception de l’ensemble, ensemble qui, d’un autre côté, forme, en sa systématisation, le tout du savoir humain. Là est l’égalité vainement cherchée et singulièrement subversive en l’ordre politique, si désirable et si salutaire en l’ordre intellectuel. Dans les péripéties dont l’instabilité des esprits menace l’Europe jusqu’à la clôture de l’ère révolutionnaire, on peut être sûr de ceci : c’est que moins on aura tendu vers l’égalité intellectuelle, plus aussi on aura aggravé les tendances vers l’égalité matérielle, qui troublent les classes inférieures et créent de si sérieux dangers. Ce sont deux plateaux d’une balance : quand l’un s’élève, l’autre s’abaisse ; si bien qu’enfin, l’éga-