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l’esprit de Dieu, et tout la conduisait directement à choisir la colombe.

Dans l’Orient, et particulièrement dans la Syrie, la colombe est un oiseau sacré[1], et justement par un motif qui devait presque forcer à admettre un rapport entre elle et l’Esprit planant sur les eaux primitives, 1 Mos., 1, 2. En effet, la colombe couvant était un symbole de la chaleur vivifiante de la nature[2]; elle remplissait donc exactement la fonction qui, dans l’histoire mosaïque de la création, est attribuée à l’Esprit divin, fonction qui consiste à faire, par sa force vivifiante, sortir du chaos de la première création le monde de la vie. En outre, lorsque la terre fut, pour la seconde fois, couverte par les eaux, ce fut une colombe envoyée par Noé qui plana sur les flots, et qui d’abord, par le rameau d’olivier qu’elle rapporta, puis par son absence définitive, annonça que la vie était redevenue possible sur la terre. Après cela, qui s’étonnera encore si, dans des écrits juifs, l’Esprit planant sur l’eau primitive se trouve positivement comparé à une colombe[3], et si, indépendamment même du récit mosaïque, la colombe est conçue comme le symbole de l’Esprit saint[4] ? Avec ce point de départ, on était bien près d’établir un rapport entre la colombe qui plane, et le Messie, sur qui l’Esprit de Dieu, comparé à une colombe, devait descendre ; cela se comprend de soi et sans qu’il soit nécessaire de s’appuyer sur des écrits juifs qui désignent l’Esprit planant sur l’eau, 1 Mos., 1, 2, comme l’esprit du Messie[5], et dans lesquels la colombe

  1. Tibull. Carm., l. 1, eleg. 8, v. 17 seq. Voyez, sur ce passage, la remarque de Broekhuis ; Creuzer, Symbolik, 2, S. 70 f. ; Paulus, Exeg. Handb., 1, a, S. 369.
  2. Creuzer, Symbolik, 2, S. 80.
  3. Chagiga, c. 2 : Spiritus Dei ferebatur super aquas, sicut columba, quæ fertur super pullos suos nec tangit illos. Comparez Ir. Gibborin, ad Genes., 1, 2, dans Schœttgen, Horæ, 1, p. 9.
  4. Targum Koheleth, 2, 12 : Vox turturis est interprétée comme Vox Spiritus sancti. Regarder cela, avec Lücke, S. 367, comme une interprétation arbitraire, c’est, ce semble, d’après les données précédentes, se permettre soi-même beaucoup d’arbitraire. Comparez De Wette, Exeget. Handb., 1, 1, S. 55 f.
  5. Bereschit rabba, sect. 2, f. 4, 4, ad Genes., 1, 2 (dans Schœttgen, l. c.) :