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est moins sévère, reçurent à côté de la glorification postérieure, le récit primitif, accordant moins d’importance à la question de Jean-Baptiste qu’au discours de Jésus sur ce personnage, discours qu’ils y rattachèrent[1].

  1. Qu’il me soit permis de parler ici, sous la forme d’une note, des moyens termes qu’ont introduits, dans la considération des rapports de Jean-Baptiste avec Jésus, ceux-là mêmes qui ont commencé à entrevoir l’impossibilité de soutenir l’opinion ordinaire. Parmi ces théologiens, il ne faut pas même compter Planck, Geschichte des Christenthums in der Periode seiner Einführung, I, Kap. 7 ; lui, admet, comme absolument historiques, les récits sur ces rapports, et cependant il ne peut pas s’empêcher de soutenir de la manière la plus formelle qu’il avait existé entre ces deux hommes un plan concerté.

    Mais le mémoire d’un anonyme, dans Henke’s neuem Magazin, 6, 3, S. 373 ff. intitulé Jean et Jésus, part de la conviction que l’opinion orthodoxe qui considère Jean comme le simple précurseur de Jésus, et comme ayant sa destination et son but, non en lui-même, mais uniquement en celui qui vint après lui, est insoutenable. Cet auteur reconnaît en même temps qu’il n’y a aucun motif à donner en faveur de l’explication naturelle, qui soupçonne un concert préalable entre ces deux hommes. Avec une grande indépendance d’esprit, il écarte l’opinion qui admet que Jean-Baptiste a signalé avec précision Jésus comme le Messie, et de ce côté il va même trop loin lorsqu’il conjecture sans fondement que peut-être Jean-Baptiste s’était cru d’abord appelé lui-même à remplir le rôle de Messie, et avait voulu se créer un parti par son baptême. Quant aux hypothèses de l’explication naturelle, il s’en faut de beaucoup qu’il les combatte suffisamment ; non seulement il accorde la parenté, l’âge à peu près égal et la liaison précoce des deux hommes, mais encore il se complaît à décrire, d’une façon romanesque, les plans de réformation universelle que les jeunes gens projetaient ensemble, le noble débat qui s’éleva entre eux, chacun d’eux jugeant l’autre plus digne de représenter le Messie, jusqu’à ce qu’enfin Jean, ayant la conscience de son insuffisance, se retira, et Jésus fut fortifié par un événement naturel, lors de son baptême, dans la conviction qu’il était le Messie.

    Winer, à l’article Jean, dans son Bibl. Realwörterbuch, 1, S. 690 ff., comprend, il est vrai, nettement la différence inconciliable qui existe entre le récit des synoptiques et celui du quatrième évangile concernant Jean-Baptiste ; il reconnaît aussi que ce dernier récit porte la couleur de la gnose de Jean l’évangéliste, mais il ne signale nulle part le caractère en partie légendaire qu’ont aussi les récits des synoptiques ; il suppose, avec Luc, la parenté et l’âge égal, avec Matthieu la liaison précoce entre Jésus et Jean-Baptiste, et, nonobstant de pareils rapports, il croit pouvoir comprendre les doutes subséquents qui se manifestent dans le message envoyé par Jean-Baptiste du fond de sa prison, et il les explique à l’aide des images de l’Ancien Testament qui formaient, dans l’esprit de Jean-Baptiste, l’idée du Messie.

    Hase aussi, §§ 52, 66, de sa Vie de Jésus, trouve vraisemblable que Jean-Baptiste ait été un parent de Jésus et qu’il ait vécu avec lui dans une amitié fondée sur la plus haute estime, sans cependant connaître la destination messianique de Jésus avant son baptême ; dès qu’il l’eut connue, dit Hase, il se subordonna à Jésus avec une abnégation magnanime.

    Il a été dans le texte suffisamment question de l’opinion de Neander.