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sur la montagne de la transfiguration, et les anges habillés de blanc qui se montrèrent sur son tombeau et qui apparurent sur la montagne de l’ascension, et l’on expliqua aussi plusieurs cures de Jésus et des apôtres par les traditions médicales des Esséniens. Indépendamment de ces idées favorites d’un temps passé, il y a véritablement quelques traits essentiels qui paraissent indiquer une relation plus étroite entre l’essénisme et le christianisme. Au premier rang, il faut placer la défense de prêter un serment et la communauté des biens. À la défense de prêter serment se rattachaient essentiellement la fidélité, l’esprit de paix et l’obéissance pour toute autorité ; à la communauté des biens, le mépris des richesses et la coutume de voyager sans aucunes provisions. Ces traits et d’autres, tels que les repas sacrés faits en commun, le rejet des sacrifices sanglants et de l’esclavage, ont tant de ressemblance avec le christianisme, que déjà Eusèbe considérait comme des chrétiens les Thérapeutes égyptiens, analogues aux Esséniens[1]. Mais, à côté, il y a des différences très essentielles qu’il ne faut pas négliger : nous n’y compterons pas, si l’on veut, le mépris du mariage, ὑπεροψία γάμου, attendu que Josèphe ne l’attribue qu’à une partie des Esséniens ; mais leur ascétisme, la rigueur avec laquelle ils célébraient la fête du sabbat, les purifications et d’autres usages superstitieux, leur attachement au nom des anges, et surtout le mystère qu’ils affectaient, leur esprit monacal, rétréci et exclusif, tout cela était étranger et même opposé aux tendances de Jésus. En outre, il n’est nulle part question des Esséniens dans le Nouveau Testament. La contribution de cette secte au développement de Jésus doit donc être bornée à l’influence incertaine qu’ont dû exercer sur lui les relations qu’il a pu avoir çà et là avec des Esséniens[2].

  1. H. E., 2, 16, seq.
  2. Comparez Bengel, Bemerkungen über den Versuch, das Christenthum aus dem Essenismus abzuleiten, dans