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tament ne précise pas à quel âge le don de prophétie lui fut communiqué, avait, suivant la tradition postérieure, prophétisé dès sa douzième année[1]. La tradition voulut encore que les sages jugements rendus par Salomon et par Daniel (1 Reg. 3, 23 seq. ; Suzan., 45 seq.) l’eussent été dès la douzième année de ces personnages[2]. Il serait bien possible que dans la première communauté chrétienne on eût fait le raisonnement suivant : Si, dans ces grands hommes de l’Ancien Testament, l’esprit qui les animait a donné des preuves d’activité dès la douzième année, il ne peut pas être demeuré caché plus longtemps dans Jésus ; et si, dès cet âge, Samuel, Daniel et Salomon se sont montrés, les deux premiers, prophètes inspirés de Dieu, et le dernier, roi sage, ce qu’ils furent plus tard, Jésus doit également s’être manifesté dès lors dans le rôle de fils de Dieu et d’instructeur de l’humanité, rôle qui lui appartint dans la suite. En effet, Luc, cela est visible, n’omet aucune phase des premiers temps de la vie de Jésus sans la parer d’un éclat divin et de signes caractéristiques qui annonçaient l’avenir : c’est dans ce style qu’il traite la naissance ; c’est d’une manière au moins significative qu’il nomme la circoncision ; mais c’est surtout au sujet de la présentation dans le Temple qu’il se donne carrière ; et l’on pourrait dire qu’il a voulu entourer aussi d’ornements convenables la dernière phase de développement que lui présentait

    Dixit R. Chama : Moses duodenarius avulsus est a domo patris sui, etc.

  1. Josèphe, Antiq., 5, 10, 4 : Samuel, ayant atteint douze ans, prophétisa : Σαμούηλος δὲ πεπληρωκὼς ἔτος ἤδη δωδέκατον, προεφήτευε.
  2. Ignat. Ep. (interpol.) ad Magnes. c. 3 : Mais Salomon… étant sur le trône à l’âge de douze ans, fit ce redoutable et difficile jugement entre les femmes au sujet des enfants… Daniel, le sage, âgé de douze ans, fut saisi de l’esprit divin, et il convainquit ces vieillards sycophantes qui convoitaient la beauté d’une femme et portaient en vain des cheveux blancs : Σολομῶν δὲ… δωδεκαετὴς βασιλεύσας, τὴν φοϐερὰν ἐκείνην καὶ δυσερμήνευτον ἐπὶ ταῖς γυναιξὶ κρίσιν ἕνεκα τῶν παιδίων ἐποιήσατο… Δανιὴλ ὁ σοφὸς δωδεκαετὴς γέγονε κάτοχος τῷ θείῳ πνεύματι, καὶ τοὺς μάτην τὴν πολιὰν φέροντας πρεσϐύτας συκοφάντας καὶ ἐπιθυμητὰς ἀλλοτρίου κάλλους ἀπήλεγξε. Ce détail se trouve, à la vérité, dans un écrit chrétien ; mais, en le comparant avec les données précédentes, on peut croire qu’il a été puisé dans une légende juive plus ancienne.