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dans le passage relatif aux pleurs de Rachel qu’il a mal compris[1]. L’autre difficulté est celle-ci : Comment la communauté des judéo-chrétiens, parmi lesquels le mythe prétendu a dû se former, aurait-elle pu accorder aux païens autant d’importance qu’il leur en est accordé dans la personne des mages[2] ? Comme si les prophètes, dans les passages cités, n’avaient pas déjà accordé cette importance aux païens ; d’autant plus qu’en réalité cette importance est un hommage qu’ils rendent au Messie, une soumission qu’ils lui témoignent, toutes choses qui étaient conformes aux sentiments des judéo-chrétiens, sans parler même des circonstances particulières de l’entrée de ces païens dans le royaume du Messie.

Ainsi, le récit évangélique étant conçu d’une manière mythique, on n’y apprend, et c’est à cela que nous devons nous arrêter, aucun détail de la vie de Jésus : seulement nous y voyons une nouvelle preuve de la croyance précise à sa qualité de Messie, que Jésus laissa derrière lui, puisque la forme messianique fut donnée même à l’histoire de son enfance[3].

Reportons-nous maintenant encore une fois au récit de Luc, chap. 2, dans les points où ce récit est parallèle à celui de Matthieu. Nous avons déjà vu que le récit de Matthieu ne suppose pas que ce qui est raconté par Luc soit arrivé précédemment ; encore moins peut-on soutenir la proposition inverse, et dire que les mages étaient venus avant les bergers. On se demande alors si, peut-être, les deux récits n’entendent pas raconter le même fait, tout en le présentant de deux manières différentes. Dans l’ancienne explication orthodoxe, qui était disposée à prendre l’étoile

  1. Comparez mes Streitschriften, 1, 1, S. 42 f. ; George, S. 39.
  2. Neander, L. J. Ch., S. 27.
  3. Schleiermacher, über den Lukas, S. 47, regarde comme symbolique le récit des mages, etc., tout en dédaignant de prendre en considération les passages de l’Ancien Testament et autres qui sont relatifs à ce récit, mais il en est puni ; car, pour l’explication du récit, tantôt il reste dans les généralités, tantôt il s’engage dans la fausse route.