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προῆγεν (v. 9), qui est à l’imparfait, ne signifie pas que l’astre précédait visiblement les mages dans leur marche, mais il signifie, comme s’il était au plus-que-parfait, qu’il était arrivé avant eux sans leur avoir été visible ; de sorte que l’évangéliste veut dire : l’étoile que les mages avaient vue en Orient, et que depuis ils n’avaient plus aperçue, reparut soudainement à Bethléem sur la maison de l’enfant ; par conséquent elle les avait précédés[1]. Mais c’est transporter, sur le terrain de l’exégèse orthodoxe, des artifices du rationalisme ; car non seulement le verbe précédait, προῆγεν, mais encore les mois jusqu’à ce que l’étoile vînt, ἕως ἐλθὼν κτλ., représentent la marche de l’astre comme un phénomène qui n’avait pas cessé précédemment, mais qui se continuait encore sous les jeux des mages. C’est ce qu’une interprétation arbitraire peut seule méconnaître ; et alors, pour être conséquente, elle devrait aller encore plus loin, et faire de ce récit merveilleux un récit naturel. De même, quand Olshausen accorde qu’une étoile, à cause de sa position dans la sphère céleste, ne peut désigner une maison isolée, mais ajoute que les mages ont bien été forcés de s’enquérir de la demeure de l’enfant, et que seulement ils ont, avec une simplicité naïve, rattaché le commencement et la fin de leur voyage à ce guide céleste[2], il met le pied sur le terrain du rationalisme, et il intercale des explications naturelles entre les lignes du texte biblique, ce qu’il reproche ailleurs avec raison à Paulus et à d’autres.

Les mages entrent alors dans la maison, offrent à l’enfant leur adoration, et lui font présent de productions de leurs contrées (v. 11). On pourrait s’étonner ici qu’il ne soit fait aucune mention de la surprise que durent éprouver ces hommes en voyant, au lieu du prince qu’ils attendaient, un enfant dans des conditions tout à fait ordinaires et peut-

  1. Vermischte Aufsætze, S. 8.
  2. Bibl. Comm. sur ce passage ; de même Hoffmann, S. 261.