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l’Église[1], que c’eût été une étoile créée exprès pour cet objet, que le créateur aurait mue et arrêtée d’après une règle particulière ; mais ce ne pourrait pas, non plus, être une étoile véritable, à la hauteur et dans la sphère des étoiles ; car un tel astre, de quelque manière qu’on veuille le mouvoir et le fixer, ne peut jamais, d’après les lois de l’optique, paraître s’arrêter immobile au-dessus d’une maison. Il faudrait donc que c’eut été quelque corps se mouvant plus bas au-dessus de la terre : aussi quelques Pères de l’Église et les apocryphes[2] ont supposé un ange qui pouvait sans doute voler au-devant des mages sous la forme d’une étoile, et s’arrêter dans Bethléem au-dessus de la maison de Marie, à une hauteur médiocre ; des modernes ont conjecturé que c’était un météore[3] ; double conjecture qui est contraire au texte de Matthieu ; la première, parce qu’il n’est pas dans les habitudes de nos évangiles de désigner quelque chose de purement surnaturel, tel qu’une apparition angélique, par une expression d’apparence naturelle, telle qu’un astre, ἀστρήρ ; la seconde, parce qu’un simple météore ne suffit pas pour tout le temps que les mages mirent à venir de leurs lointaines demeures jusqu’à Bethléem ; à moins qu’on ne veuille admettre que Dieu avait créé pour le voyage des mages de Jérusalem à Bethléem un météore nouveau, et tout autre que celui qu’il leur avait montré dans leur patrie.

Plusieurs commentateurs orthodoxes se sont trouvés tellement pressés par les difficultés relatives à l’étoile, qu’ils ont fait tous leurs efforts pour éviter d’admettre qu’un astre avait précédé les mages jusqu’à Bethléem et s’était arrêté sur une maison : aussi l’explication de Süskind a-t-elle trouvé beaucoup d’approbateurs. Suivant lui, le verbe

  1. Par exemple Eusèbe, Demonstr. evang. 9, cité dans Suicer, 1, p. 559.
  2. Chrysostôme et d’autres dans Suicer, l. c., et l’Evangelium infantiæ arabicum, c. 7.
  3. Voyez dans Kuinœl, Comm. in Matth. p. 23.