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ληφθῆναι αὐτὸν ἐν τῇ κοιλίᾳ ; or, l’importance qu’on y attache montre que cette détermination a été dictée par un intérêt dogmatique ; intérêt qui ne peut être autre que celui qui, dans l’Ancien et le Nouveau Testament, a fait dire des noms d’un Isaac, d’un Ismaël et d’un Jean, qu’ils avaient été révélés, avant la naissance, aux parents des enfants ; intérêt en vue duquel aussi les rabbins attendaient une révélation divine pour le nom du Messie[1]. Certainement ce furent bien plutôt des motifs tout à fait naturels qui décidèrent les parents de Jésus à lui donner ce nom très commun chez leurs compatriotes (ישוע abrégé de יהושע, c’est-à-dire Κύριος σωτηρία, le Seigneur est le salut). Ce nom concorda d’une manière significative avec la vocation qu’il se fit plus tard de Messie et de Sauveur ; on crut ne pas pouvoir considérer cette coïncidence comme un effet du hasard ; il parut aussi plus convenable de faire déterminer le nom du Messie par la volonté divine que par l’arbitraire humain ; et c’est ainsi que l’ange chargé d’annoncer la conception fut aussi chargé de fixer ce nom.


§ XXXIV.


Les mages et leur étoile ; la fuite en Égypte et le massacre des innocents
à Bethléem ; critique de l’opinion des supranaturalistes.

À côté du récit de Luc sur l’introduction du Messie nouveau-né dans le monde, marche parallèlement, dans Matthieu, un récit qui n’en est pas moins notablement différent (2, 1 seq.). Il a aussi pour but de décrire la venue solennelle de l’enfant messianique, la première annonciation de sa naissance, dont le ciel même se chargea, et le premier

  1. Pirke R. Elieser, 33 : Sex hominum nomina dicta sunt antequam nascerentur, Isaaci nempe, Ismaelis, Mosis, Salomonis, Josiæ et nomen regis Messiæ. (Comparez Bereschit rabba, sect. 1, 3, 5, dans Schœttgen, Horæ, 2, p. 436.) Si primitivement on n’a entendu par là que le nom de la fonction messianique, il fallut bien, dès qu’une personne réelle fut reconnue comme Messie, penser à son nom (contre Hoffmann, S. 247, répété par Osiander, S. 103).