Page:Strauss David - Vie de Jésus, tome 1, Ladrange 1856.djvu/313

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

avaient ici aussi entonné un cantique. Un judéo-chrétien, qui avait déjà quelques données sur la naissance de Jésus, dit en terminant Gabler, n’a pu se la figurer autrement qu’elle n’est représentée ici[1].

L’explication de Gabler montre d’une manière remarquable combien il est difficile de se délivrer complètement de l’interprétation naturelle, et de s’élever tout à fait à l’interprétation mythique ; car, tandis que ce théologien croit être en plein sur le terrain mythique, il garde cependant encore un pied sur celui de l’explication naturelle. En effet, dans le récit de Luc, il accepte comme historique une particularité qui, par sa liaison avec les éléments non historiques et sa conformité avec l’esprit de l’antique légende chrétienne, apparaît comme purement mythique, à savoir, que Jésus est véritablement né dans une demeure de bergers ; et il emprunte à l’explication naturelle une supposition que l’explication mythique n’a nul besoin d’imposer au texte, à savoir, que les bergers qui eurent la prétendue apparition des anges étaient propriétaires de l’étable où Marie enfanta. La dernière de ces particularités tire toute sa valeur de la première ; or, ce qui a été dit de la naissance de Jésus dans une étable appartient à toute cette combinaison par laquelle Luc fait arriver, à l’aide du recensement, les parents de Jésus, de Nazareth à Bethléem. Nous savons maintenant ce qu’il faut penser de ce recensement ; il tombe sans ressource devant la critique, et en même temps tombe tout ce qui s’appuie là-dessus. Si les parents de Jésus n’étaient pas étrangers à Bethléem, s’ils n’y arrivèrent pas en même temps qu’une grande affluence appelée par la circonstance d’un recensement, il n’y a plus aucune raison pour croire que Marie ait été obligée de prendre une étable pour le lieu de son accouchement. D’un autre côté, rien ne concorde mieux avec l’esprit de l’ancienne lé-

  1. Neuest. theol. Journal, 7, 4, S. 412 f.