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d’un prince, et, dans la phrase suivante, l’exécution de cet édit, il n’est pas vraisemblable qu’un intervalle de dix ans se trouve entre la promulgation et l’exécution. Mais, ce qu’il faut surtout observer, l’évangéliste parlant, v. 1, du décret, et v. 2, de l’exécution postérieure de dix ans, aurait de nouveau, v. 3, parlé d’un voyage au temps du décret, sans faire remarquer l’intervalle de temps qui s’était écoulé ; cela né s’accorde avec aucune forme de narration raisonnable.

À des altérations aussi arbitraires du texte, il faut toujours préférer des tentatives où l’on cherche une issue par la seule voie de l’explication. À la vérité, prendre avec quelques uns πρώτη pour προτέρα, et ἡγεμονεύοντος Κυρηνίου, non pour un génitif absolu, mais pour un génitif régi par ce comparatif, et ainsi entendre un recensement avant celui de Quirinus[1], c’est faire violence à la grammaire ; ce n’est pas en faire moins à la critique que d’intercaler πρὸ τῆς après πρώτη[2]. On ne peut pas davantage admettre qu’il y ait eu, dès le vivant d’Hérode, un préliminaire du recensement fait plus tard par Quirinus ; que ce préliminaire, où Quirinus ne fut pas employé, fut peut-être le serment prêté à Auguste, et qu’ensuite ces deux opérations ont été comprises sous le même nom. Pour justifier, en quelque façon, cette dénomination, on suppose que peut-être Quirinus avait été envoyé en Judée, dès le vivant d’Hérode, en qualité de commissaire extraordinaire chargé d’établir les taxes[3] ; cette explication du mot ἡγεμονεύοντος est rendue impossible par l’addition du mot la Syrie ; car la locution de ἡγεμονεύοντος Συρίας ne peut signifier que præses Syriæ.

Ainsi au temps où Matthieu, 2, 1, et Luc, 1, 5, 26, placent la naissance de Jésus, il est impossible qu’il y ait eu

  1. Storr, Opusc. acad. 3, p. 126, seq. ; Süskind, vermischte Aufsætze, S. 63, et récemment Tholuck, S. 182 f.
  2. Michaelis, Anmerck. z. d. St. und Einl. in das N. T. 1, 71.
  3. Münter, Stern der Weisen, S. 88. Comparez Hoffmann, S. 235.