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constance, le premier menaça le second de lui faire sentir qu’il n’était qu’un sujet[1] ; on fait valoir le serment que les Juifs, d’après Josèphe, furent obligés de prêter à Auguste, dès le vivant d’Hérode[2], et l’on suppose qu’Auguste, étant résolu à diminuer, après la mort d’Hérode, l’autorité de ses fils, a bien pu ordonner un recensement[3] dans les dernières années de ce prince. Peut-être aussi, l’absence d’Archélaüs, qui s’était rendu à Rome pour régler sa succession au trône, l’occupation de Jésusalem par le procurateur romain Sabinus, et l’oppression qu’il fit subir aux Juifs[4], sont-elles des circonstances qui semblent suggérer l’idée d’un recensement.

Mais il est inutile de discuter en détail ces combinaisons plus ou moins arbitraires, plus ou moins dénuées d’autorités historiques ; notre évangéliste nous dispense de ce soin, en ajoutant que le recensement dont il parle fut fait pendant que Quirinus était gouverneur de la Syrie, ἡγεμονεύοντος τῆς Συρίας Κυρηνίου. Or, il est certain que le recensement de Quirinus ne se fit ni sous Hérode, ni au commencement du règne d’Archélaüs, époque où Luc aussi place la naissance de Jésus ; alors Quirinus n’était pas encore gouverneur de la Syrie ; cet emploi fut rempli, dans les dernières années d’Hérode, par Sentius Saturninus, puis par Quintilius Varus ; ce ne fut que longtemps après la mort d’Hérode que Quirinus eut le gouvernement de la Syrie. Ce magistrat fit en effet un recensement ; cela est attesté par Jo-

  1. Ὅτι, πάλαι χρώμενος ἀυτῷ φίλῳ, νῦν ὑπηκόῳ χρήσεται. Josèphe, Antiq. 16, 9, 3. Mais la bonne intelligence fut rétablie longtemps avant la mort d’Hérode, Josèphe, Ant. 16, 10, 9.
  2. Ib. 17, 2, 4 : Tout le peuple juif promettant par serment d’être fidèle à l’empereur et aux intérêts du roi, παντὸς τοῦ Ἰουδαϊκοῦ βεϐαιώσαντος δι’ὁρκῶν ἦν μὴν εὐνοῆσαι Καίσαρι καὶ τοῖς βασιλέως πράγμασι. Ce serment, loin d’être une mesure mortifiante pour Hérode, avait été prise dans son intérêt ; c’est ce que prouve la passion avec laquelle il punit les Pharisiens qui ne le prêtèrent pas.
  3. Tholuck, S. 192 f. ; mais (et c’est la réfutation de toutes ces suppositions) l’insurrection qu’excita le recensement après la déposition d’Archélaüs prouve que c’était la première mesure romaine de cette espèce dans la Judée.
  4. Antiq. 17, 9, 3 ; 10, 1 seq. ; B. j. 2, 2, 2. Mais Sabinus ne voulait que les forteresses et le trésor d’Hérode.