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§ XXXI.


Visite de Marie à Élizabeth.

L’ange qui annonça à Marie sa grossesse prochaine l’avait instruite en même temps de celle de sa parente Élizabeth (Luc, 1, 36), laquelle en était déjà au sixième mois. Immédiatement après, Marie entreprend un voyage pour se rendre auprès d’elle ; et ce qu’il y a d’extraordinaire dans cette visite, c’est qu’au moment du salut donné par Marie, l’enfant se meut joyeusement dans le sein d’Élizabeth, et celle-ci, saisie à son tour d’un transport d’enthousiasme, salue Marie comme mère du Messie. À quoi cette dernière répond en forme de cantique (Luc, 1, 39-56).

Les commentateurs rationalistes croient se tirer sans peine de ce récit de l’évangile de Luc par une explication toute naturelle. L’inconnu qui excita, dans le cœur de Marie, des espérances si précises, dit Paulus[1], l’avait instruite, en même temps, de ce qui était semblablement arrivé à Élizabeth ; c’est dès lors une raison de plus pour Marie de conférer sur son propre état avec sa parente, plus âgée. Dans l’entrevue, elle lui raconte d’abord les circonstances de son aventure, ce dont l’évangéliste ne parle pas, parce qu’il ne veut pas répéter ce qu’il a déjà rapporté une fois. Paulus croit qu’il faut suppléer des paroles de Marie, non seulement avant le commencement du discours d’Élizabeth, mais encore dans le courant même de ce discours, de sorte que Marie ne raconta son histoire qu’avec des interruptions, pendant lesquelles Élizabeth prit la parole. L’émotion de la mère, telle est la continuation de l’explication de Paulus, se communiqua, d’après les lois naturelles, à l’enfant, qui fit un mouvement, comme c’est l’habitude des fœtus de six mois. La mère, lorsque Marie eut achevé son récit, jugea

  1. Exeget. Handbuch, 1, a, S. 120 ff.