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et protégeât, et l’on considéra les frères de Jésus, ἀδελφοὺς Ἰησοῦ, dont il est parlé dans le Nouveau Testament, comme des enfants que Joseph avait eus d’un autre mariage[1]. Ce n’est pas tout : non seulement Marie ne devait pas avoir été touchée par Joseph, mais encore la naissance de Jésus ne devait pas lui avoir fait perdre sa virginité[2]. Plus tard même il ne suffit plus que Marie eût conservé sa virginité intacte, on exigea de Joseph aussi une virginité constante ; ce ne fut pas assez qu’il n’eût eu avec Marie aucune communication conjugale, il fallut qu’il n’eût jamais été engagé dans les liens du mariage. De la sorte, ce qu’Épiphane même accorde, à savoir, que Joseph avait eu des fils d’une femme précédente, fut rejeté par saint Jérôme comme une rêverie impie et apocryphe, et dès lors les frères de Jésus, ἀδελφοὶ Ἰησοῦ, furent rabaissés au rang de ses cousins[3].

Il est aussi des théologiens orthodoxes modernes qui soutiennent, avec les Pères de l’Église, que jamais des relations conjugales n’ont existé entre Joseph et Marie, et qui croient pouvoir expliquer en conséquence les expressions évangéliques qui semblent dire le contraire. Relativement au mot premier-né, πρωτότοκος, Olshausen assure qu’il peut aussi bien signifier le fils unique que le premier à côté d’autres ; Paulus lui donne raison en cela ; et Clemen[4] et Fritzsche cherchent vainement à démontrer l’impossibilité de cette explication. Il est dit, il est vrai, 2 Mos., 13, 2 : Sanctifica mihi omne primogenitum (πρωτότοκον, πρωτογενές, lxx) quod aperit vulvam ; or, Jéhovah ne sanctifiait pas seulement un premier-né qui était suivi d’autres

  1. Voyez Origène, in Matth., t. 10, 17 ; Epiphan., Hæres., 78, 7 ; Historia Josephi, c. 2 ; Protev. Jac., 9, 18.
  2. Chrysost., Hom. l42 ; dans Suicer, v. Μαρία. Le détail en est repoussant dans le Protévangile de Jacques, c. 19 et 20.
  3. Hieron. ad Matth., 12, et Advers. Helvid. Dans Suicer, 1, p. 85.
  4. Les frères de Jésus dans Winer’s Zeitschrift für wissenschaftliche Theologie, 1, 3, S. 364 f.