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jourd’hui ; expressions qui presque inévitablement devaient faire songer à un rapport de filiation physique ; elle était encore fortifiée par la prophétie d’Isaïe sur la vierge enfantant, prophétie qui paraît avoir été rapportée au Messie comme tant d’autres dont le sens immédiat s’était obscurci ; ce rapport peut se retrouver dans le choix du mot παρθένος, c’est-à-dire la vierge pure, immaculée, chez les Septante, tandis qu’Aquila et d’autres traducteurs grecs emploient simplement le mot νεᾶνις, jeune fille[1]. De la sorte, les idées de fils de Dieu et de fils de la vierge se combinèrent tellement que l’on fit intervenir l’opération divine en place de l’opération humaine et paternelle. À la vérité, Wetstein assure que jamais Juif n’a rapporté au Messie le passage d’Isaïe, et Schœttgen même n’a pu recueillir qu’avec une peine extrême, dans les rabbins, des indices de l’opinion qui regarde le Messie comme fils d’une vierge[2]. Mais nos notions sur les idées messianiques de cette époque sont fort imparfaites ; et ces objections n’empêchent pas de supposer qu’alors régnait une opinion dont les prémisses complètes se trouvent dans l’Ancien Testament, et dont le Nouveau présente une trace à peine méconnaissable.

Reste encore une objection que je ne puis plus nommer propre à Olshausen, depuis que d’autres théologiens s’empressent de prendre part à la gloire de la faire valoir. On dit que l’explication mythique du récit évangélique est particulièrement dangereuse, parce qu’elle est de nature à faire naître, bien que d’une manière obscure, des images profanes et sacrilèges sur l’origine de Jésus, assurant qu’elle ne peut que favoriser une opinion qui anéantit l’idée d’un rédempteur, à savoir, que Jésus est venu à la lumière du jour déshonnêtement, Marie n’étant pas mariée lorsqu’elle le portait

  1. De Wette, Exeget. Handbuch, 1, 1, S. 17.
  2. Horæ, 2, p. 421 et seq. Toutefois des rabbins plus modernes ont généralement cette opinion. Voyez Matthæi, Religionsgl. der Apostel, 2, a, S. 553 ff.