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avait le plus spécialement choisis, étaient engendrés, avec, l’aide divine, de parents qui, d’après le cours naturel des choses, n’auraient pu avoir d’enfants ; et comme, pour ces derniers, dans l’idée des croyants, l’opération divine renouvelait les facultés éteintes des deux conjoints (Rom. 4, 19), il n’y avait plus qu’un pas à faire pour admettre que la divinité, pour la naissance du Messie, le plus grand de tous ces instruments, remplaçait la faculté absente de l’un par une faculté absolue chez l’autre ; ce n’est qu’un degré de plus dans le merveilleux. Le rédacteur de l’évangile de Luc doit l’avoir senti, car il fait taire les doutes de Marie avec la sentence par laquelle Jéhova, dans l’Ancien Testament, fait taire ceux de Sara[1]. Cette gradation devait s’établir complètement, ne pouvant être empêchée ni par le respect des Juifs pour le mariage, respect toujours accompagné parallèlement d’une estime ascétique pour le célibat, ni par l’idée dominante qui représentait le Messie comme un homme ordinaire et à côté de laquelle, depuis Daniel, marchait l’idée de Messie, être supérieur. Mais une occasion de développer l’idée qui faisait le fonds de nos histoires de la naissance était, en partie, dans le titre de fils de Dieu, υἱὸς Θεοῦ, devenu l’attribut du Messie[2]. Il est dans la nature de ces expressions primitivement métaphoriques d’être entendues, avec le temps, de plus en plus au propre et dans un sens strict ; et parmi les Juifs postérieurs en particulier, la tendance universelle était de donner une signification matérielle à ce qui d’abord en avait eu une spirituelle et figurée. Cette inclination naturelle à prendre dans un sens de plus en plus littéral le titre de fils de Dieu donné au Messie, était fortifiée par un passage du Psaume, 2, 7, où les mots mon fils sont suivis des mots : Je t’ai engendré au-

  1. Mos., 18, 14, lxx : Μὴ ἀδυνατήσει παρὰ τῷ Θεῷ ῥῆμα ; — Luc, 1, 37 : Ὅτι οὐκ ἀδυνατήσει παρὰ τῷ Θεῷ πᾶν ῥῆμα.
  2. Comparez Eichhorn, Einl. in das N. T., l. c.