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été, dans ce cas, accompagné nécessairement du pronom quelqu’un, τίς, ou ne doit pas être rapporté, en l’absence de ce pronom, au sujet : l’ange Gabriel, ὁ ἄγγελος Γαϐριήλ). Paulus ajoute que Marie, ayant entendu parler de la vision de Zacharie, compléta la scène dans son esprit, en supposant que ce survenant avait été l’ange Gabriel.

Déjà Gabler, dans un examen du Commentaire de Paulus[1], a mis au grand jour, avec une crudité de termes qui n’est pas messéante, ce qui se cache sous cette explication du récit évangélique. Dans l’opinion de Paulus, dit-il, il ne reste plus qu’à penser que quelqu’un s’est donné à Marie pour l’ange Gabriel, et, à l’aide de cette imposture, a couché avec elle afin d’engendrer le Messie. Quoi ! demande Gabler, Marie, au temps où elle est fiancée, deviendra grosse d’un autre, et l’on dira qu’elle l’est devenue sans péché d’une manière approuvée de Dieu, par une opération innocente et sainte ! Marie se montrerait comme une pieuse mystique, et le prétendu messager du ciel serait ou un trompeur, ou, lui aussi, un grossier mystique. Ce théologien, du point de vue chrétien, trouve avec raison une pareille assertion révoltante ; mais, du point de vue de la science, elle contredit également les lois de l’exégèse et de la critique.

Ici, l’auteur de l’Histoire naturelle du grand prophète de Nazareth doit être considéré comme le plus digne interprète de Paulus. Bien que, lors de la rédaction de cette partie de son ouvrage, il ne put pas encore profiter du Commentaire de ce théologien, il est tout à fait animé du même esprit, et il développe sans crainte ce que celui-ci cache encore sous un voile. L’historien Josèphe a raconté[2] qu’un chevalier romain (cette aventure se passa à l’époque même de Jésus) gagna à ses désirs la chaste épouse d’un noble romain, en

  1. Dans Neuest. theol. Journal, 7. Bd., 4. Stück., S. 407 f. Comparez Bauer, Hebr. Myth., 1, S. 192, e, ff.
  2. Antiq., 18, 3, 4.