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elle ne pourrait conférer des titres à la dignité de Messie, laquelle était attachée au véritable sang de David. Celui qui aurait regardé Joseph simplement comme le père adoptif de Jésus, ne se serait guère donné la peine de montrer qu’il descendait de David ; et si, après avoir établi que Jésus était fils de Dieu, on avait conservé encore un intérêt à le représenter comme fils de David, on aurait plutôt, dans cette vue, pris la généalogie de Marie, car, dans le cas où il n’existait aucun père mortel, il fallait recourir, quoique ce fût contre l’usage, à l’arbre généalogique de la mère. Enfin, si, du temps de la rédaction de ces généalogies, on n’avait pas admis un rapport plus étroit qu’une simple adoption entre Joseph et Jésus, plusieurs auteurs ne se seraient pas occupés à dresser un arbre généalogique où Joseph eût sa place, et il ne nous en resterait pas encore deux échantillons différents.

il n’est donc guère possible de contester à ces savants que ces généalogies ont été rédigées dans l’opinion que Jésus a été le véritable fils de Marie et de Joseph. Les auteurs ou compilateurs de nos évangiles, bien que convaincus, pour leur part, de l’origine supérieure de Jésus, les ont reçues dans leur collection. Seulement Matthieu (1, 16), trouvant dans son original : Joseph engendra Jésus de Marie, Ἰωσὴφ δὲ ἐγέννησε τὸν Ἰησοῦν ἐκ τῆς Μαρίας (comparez V. 3. 5-6), et ayant une autre opinion, changea ces mots en : Joseph, époux de Marie, de laquelle naquit Jésus, τὸν Ἰωσὴφ τὸν ἄνδρα Μαρίας, ἐξ ἧς ἐγεννήθη Ἰησοῦς. Par la même raison, Luc, de son côté, au lieu de mettre simplement : Jésus fils de Joseph, Ἰησοῦς υἱὸς Ἰωσήφ, mit : Jésus fils, comme on croyait, de Joseph, ὢν, ὡς ἐνομίζετο, υἱὸς Ἰωσήφ. Nous avons remarqué plus haut que nos généalogies ne peuvent pas avoir été composées avec l’opinion que Joseph n’était pas le père de Jésus ; et il ne faut pas s’appuyer sur cette remarque, pour objecter qu’alors il ne peut