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ser, sans contradiction, que Joseph n’a pas été le père de Jésus[1], et Augustin ne fut pas heureux dans sa réponse, quand il fit observer qu’en raison de la prérogative du sexe masculin, la généalogie de Jésus avait dû être rattachée à Joseph, qui était, sinon par un lien corporel du moins par un lien spirituel, époux de Marie[2]. Dans ces derniers temps, plusieurs théologiens ont soutenu que la nature des arbres généalogiques, dans Matthieu et dans Luc, montraient que les rédacteurs avaient considéré Jésus comme le véritable fils de Joseph[3]. En effet, les généalogies doivent prouver que Jésus descend par Joseph de la race de David ; mais que prouvent-elles, si Joseph n’a pas été le père de Jésus ? Dans Matthieu (1, 1) la première assertion (et c’est la tendance de toute la généalogie) est que Jésus est fils de David, υἱὸς Δαυίδ ; mais cette assertion est ensuite détruite par le passage postérieur où est nié l’engendrement de Jésus par Joseph, fils de David. Il n’est donc nullement vraisemblable que la généalogie et l’histoire de l’enfance proviennent du même auteur[4] ; et il faudra admettre, avec les théologiens susdits, que les généalogies ont été prises ailleurs. On ne remédierait à rien en observant que, Joseph ayant, sans aucun doute, adopté Jésus, la généalogie du premier est devenue celle du second ; car l’adoption peut bien suffire pour transférer au fils adoptif certains droits extérieurs, tels que le droit d’hériter, etc.[5] ; mais

  1. Augustinus, Contra Faustum Manichæum, L. 23, 3, 4.
  2. L. c., n. 8.
  3. Esquisse du dogme, etc., dans Schmidt’s Bibl., l. c., S. 403 f. : K. Ch. L. Schmidt, ib., 3, 1, S. 132 f. ; Schleiermacher, Glaubenslehre, 2, § 97, S. 71. Comparez Wegscheider, Institut., § 123, n. d.
  4. Ce qui est déclaré expressément vraisemblable par Eichhorn, Einl. in das N. T., 1, S. 425, et du moins possible par De Wette, Exeg. Handbuch, 1, 1, S. 7.
  5. Dire, comme Hoffmann, S. 200, qu’il s’agit aussi, dans le cas de Jésus, d’un héritage, à savoir de celui de la prophétie, ce n’est que jouer sur les mots. Aussi lui-même ne trouve-t-il pas que son argument soit probant : car avoir été adopté, du côté paternel, dans la race de David, ne lui paraît suffisant qu’autant qu’il y a une vraie descendance davidique du côté maternel ; ce qu’à tort il croit établi dans la généalogie de Luc.