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dans des temples magnifiques élevés par une criminelle piété ; c’étaient eux qui parlaient dans les oracles et profitaient de leur connaissance supérieure pour s’attacher davantage les mortels égarés ; c’étaient eux, enfin, qui faisaient tous ces miracles, merveilles perpétuelles du monde païen. Ou bien, quand une philosophie négative, rompant les vieilles entraves, foula aux pieds l’autorité traditionnelle, les religions furent dépeintes comme un système calculé habilement pour exploiter le grand nombre au profit du petit. La vue complète du mouvement religieux de l’humanité ne permet pas ces appréciations partiales et erronées. Ni les démons n’ont inspiré le polythéisme, ni un calcul habile n’a fondé sur des populations indifférentes des institutions également artificielles et artificieuses. Un même souffle a partout, de plus en plus puissant et fort, pénétré les intelligences et animé les cœurs ; un même germe s’est partout développé à des degrés divers.

Aussi est-il possible de marquer une ascension graduelle, une éclosion croissante, une succession historique. Si nous parcourons du regard les populations humaines qui se partagent présentement la surface terrestre, nous voyons des monothéistes (chrétiens, musulmans et juifs), des zoroastriens (les guèbres), des bouddhistes innombrables en Asie, des polythéistes dans l’Inde brahmanique, et des fétichistes qui couvrent la plus grande partie de l’Afrique et de l’Océanie. Transportons-nous par la pensée à dix-huit siècles en arrière, au moment où la république romaine s’abîmait pour faire place à l’empire ; alors il n’y avait ni musulmans ni chrétiens ; le nombre des polythéistes était infiniment plus grand puisqu’il comprenait tout ce qui, se plaçant aujourd’hui sous l’in-