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bien loin de suffire ; car, si les deux pères de Joseph étaient des frères véritables, fils du même père, ils avaient un seul et même arbre généalogique ; et, dans ce cas, les deux généalogies ne devraient avoir de différent que le père de Joseph ; mais, passé celui-là, elles auraient dû concourir aussitôt de nouveau. Pour expliquer comment elles peuvent diverger jusqu’à David, il faut ajouter la seconde hypothèse, que Julius Africanus a faite aussi, à savoir, que les deux pères de Joseph n’avaient été que des demi-frères, et qu’ils avaient eu la même mère et non le même père. On devrait donc admettre que la mère des deux pères de Joseph a été mariée deux fois, une fois avec le Matthan de Matthieu, lequel Matthan descendait de David par Salomon et la ligne royale, et auquel elle engendra Jacob, et une autre fois, auparavant ou après, avec le Matthat de Luc, lequel Matthat était descendant de David par Nathan, et auquel elle engendra Éli. Éli s’étant marié et étant mort sans enfant, son demi-frère Jacob épousa la veuve et engendra Joseph, qui fut légalement considéré comme le fils du défunt.

Sans doute, l’hypothèse d’un mariage aussi compliqué dans deux degrés qui se suivent immédiatement, hypothèse à laquelle la divergence des deux généalogies nous a forcés, n’est pas absolument impossible, mais elle est invraisemblable. Or, la difficulté en est encore redoublée par la concordance mal-venue qui, au milieu des séries divergentes, se rencontre, comme il a déjà été dit, dans les deux degrés de Salathiel et de Zorobabel. En effet, pour expliquer comment Neri dans Luc peut, aussi bien que Jéchonias dans Matthieu, être dit le père de Salathiel, père de Zorobabel, il faudrait non seulement renouveler l’hypothèse d’un mariage entre un frère et la veuve de son frère, mais encore admettre que les deux frères qui se sont succédé dans le mariage avec la même femme n’ont été frères que du côté maternel. Ce n’est pas diminuer essentiellement la difficulté